Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 70.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour notifier son alliance avec les partisans de la commune. Vainement, on fait observer à ce candidat, aussi impatient que galonné, qu’il oublie la constitution et les lois, qu’un officier, un général en activité ne peut pas être député, qu’un militaire ne doit pas se mêlera la politique, écrire dans les journaux, tracer des programmes d’élection : n’importe, M. le général Thibaudin n’est pas arrêté pour si peu. Il a sa manière de comprendre ses droits et ses obligations, et c’est un ancien ministre de la guerre, attaché encore à un des grands comités de l’armée, qui offre cet exemple ! M. le général Thibaudin vous prouvera que c’est là le devoir républicain, qui s’accorde on ne peut mieux avec le devoir militaire. M. le rapporteur du budget vous prouvera à son tour que l’ordre financier de la république s’accommode très bien avec les déficits croissans, avec les emprunts indéfinis, avec toutes les prodigalités de parti, et que le progrès consiste à revenir en arrière, à compliquer le budget ou plutôt à multiplier les budgets, de telle façon qu’on ne se reconnaît plus dans la situation financière de la France. Les républicains du sénat enfin vous prouveront que, s’il y a une élection conservatrice comme l’élection sénatoriale du Finistère, il y a un moyen bien simple : il n’y a qu’à ordonner une enquête, à aller recueillir sur les chemins les plus puérils commérages, compter les consommations dans les cafés de Landerneau, — après quoi on décrète l’invalidation ! C’est le courant du jour, ou plutôt c’est la continuation d’un système qui ne date malheureusement pas d’hier. C’est ainsi que les républicains entendent l’équité libérale dans les rapports des partis, l’ordre dans les finances, le respect des devoirs dans l’armée, la prévoyance dans la politique. Ils ont beau se débattre et disputer sur des programmes pour les élections qui se préparent ; le programme, c’est ce qu’ils ont fait depuis quelques années et ce qu’ils font encore tous les jours. Il reste à savoir si le pays est disposé à ratifier une politique qui n’a eu jusqu’ici d’autre résultat sensible que la lassitude, un malaise à peu près universel et un grand doute pour l’avenir.

Les affaires de l’Europe se sont un peu éclaircies pour cet été. Le danger des grandes querelles, a disparu, ou du moins les questions qui ont pu paraître un instant menaçantes pour la paix ont été prudemment remises à la discrétion de la diplomatie, qui arrange tout comme elle peut. Ce n’est point cependant que cette vie européenne, en s’apaisant à demi, soit absolument inoccupée. Tous les pays ont plus ou moins leurs affaires, leurs incidens, leurs deuils, leurs crises intérieures, leurs révolutions de pouvoir ou de parlement. L’Allemagne ensevelit ses morts, le prince Frédéric-Charles, le général de Manteuffel, qui viennent d’être enlevés brusquement, presque le même jour, qui, aux heures des grandes et tragiques mêlées, ont été de sérieux adversaires pour la France. Ils représentaient pour l’Alle-