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Transvaal aux possessions britanniques ; comment les Boers répondirent par une insurrection à cette invasion de leurs droits et affrontèrent victorieusement les forces que l’Angleterre envoya contre eux. M. Gladstone s’honora et honora son pays en ne persistant pas dans une entreprise inique, en mettant un terme à une lutte où l’inégalité des forces était trop grande pour qu’il y eût la moindre gloire à triompher, et en ne se croyant point tenu d’écraser, par point d’honneur militaire, une poignée de braves gens qui se faisaient tuer pour défendre une indépendance chèrement acquise. Il accorda la paix au Transvaal, mais en lui imposant d’assez dures conditions : la présence d’un résident anglais, chargé de contrôler les rapports des Boers avec les noirs des régions voisines, l’interdiction de conclure des traités sans l’agrément de l’Angleterre, enfin, une délimitation assez étroite de son territoire. La question commerciale, celle qui dominera toutes les autres dans un avenir prochain, apparaît dans ce traité pour la première fois. La convention détermine, étape par étape, une route qui longe une des frontières du Transvaal, dans la direction de l’Afrique centrale, et elle interdit au Transvaal de mettre obstacle par aucun empêchement matériel et par aucun péage à ce que les commerçans anglais fassent usage de cette route, qui doit toujours demeurer libre. Ce traité, qui porte la date du 3 août 1881, fut ratifié par l’assemblée générale des Boers, le 20 octobre suivant ; mais ce fut avec une difficulté extrême que cette ratification fut obtenue. La majorité des Boers considérait que le traité n’assurait pas d’une façon suffisante l’indépendance de la république, et ils en regardaient certaines clauses comme humiliantes. Les négociateurs, qui avaient été les chefs de la résistance aux Anglais et qui appréhendaient le renouvellement d’une lutte trop inégale, arrachèrent l’adhésion du volksraad, en promettant d’ouvrir immédiatement des pourparlers en vue de la révision des clauses qui donnaient le plus de prise à la critique. Une délégation à la tête de laquelle était le président même de la république, M. Krüger, se rendit en Europe, où elle visita la Hollande, la France, le Portugal et la Prusse, et elle signa à Londres, le 5 février 1884, une convention modificative qui étendait la frontière méridionale du Transvaal jusqu’au territoire de Natal et jusqu’au Griqualand, et transformait le résident anglais en un consul ordinaire. La république sud-africaine, comme on la baptisait dans cette convention, recouvrait donc ses droits d’état souverain ; mais elle prenait l’engagement de respecter l’indépendance des Svazis, c’est-à-dire des peuplades établies entre son territoire et les possessions portugaises du Mozambique, de ne tolérer l’esclavage des naturels sous aucune forme, et de prêter son concours aux autorités du Cap et aux agens