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Les mouvemens prescrits par Blücher s’opérèrent dans la journée du 2 mars, mais non sans difficultés. Pour masquer la retraite de l’armée, Kleist poussa une forte reconnaissance offensive sur May. Marmont ne se laissa pas prendre au stratagème. Il avertit Mortier de la marche en retraite des alliés et l’invita à le rejoindre immédiatement. Les deux corps réunis reçurent vigoureusement les Prussiens de Kleist et les poursuivirent la baïonnette dans les reins. La marche de l’ennemi s’étant ralentie dans le défilé de Mareuil, son arrière-garde dut quelque temps faire face aux Français et perdit un grand nombre de soldats. L’ennemi se retira, toujours suivi par Marmont, qui franchit l’Ourcq à Fulaines. A minuit, les têtes de colonnes de Marmont arrivèrent à La Ferté-Milon, que Blücher venait à peine d’évacuer. Le lendemain matin, 3 mars, il restait encore une grande masse de troupes sur la rive gauche de la rivière, à Neuilly-Saint-Front. Marmont y courut et les attaqua avec vigueur. L’ennemi, pour arrêter l’élan des Français, mit en batterie vingt-quatre pièces de canons ; grâce à ce feu terrible, l’arrière-garde put achever de passer l’Ourcq. Dans cette chaude affaire, Marmont eut son cheval tué sous lui, traversé d’outre en outre par un boulet.

Bien que le 3 mars au matin, les alliés se trouvassent presque tous concentrés derrière l’Ourcq, la situation de Blücher ne s’était guère améliorée, car s’il avait passé l’Ourcq, Napoléon avait, de son côté, passé la Marne à La Ferté-sous-Jouarre, et il marchait sur l’armée de Silésie. L’avant-garde impériale s’était même avancée jusqu’à Recourt[1]. Chaque jour rapprochait davantage Napoléon de Blücher; déjà l’empereur et Marmont se donnaient la main, puisque de Recourt à Neuilly-Saint-Front il n’y a pas, à vol d’oiseau, plus de 8 kilomètres.

Blücher, nous l’avons dit, espérait trouver à Oulchy, où il arriva dans la nuit du 2 au 3 mars, le corps de Winzingerode ; mais il n’y trouva pas même la moindre nouvelle de ce général. Dans ces circonstances, il y avait pour le feld-maréchal trois partis à prendre. Le premier consistait à s’arrêter derrière l’Ourcq et à attendre dans cette

  1. Correspondance de Napoléon, n° 21426.