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L’expulsion immédiate de Villars, c’était alors la préoccupation principale de la cour de Vienne; elle apparaît dans toutes les correspondances : elle avait fait l’objet d’un rescrit spécial adressé par l’empereur Léopold à Kaunitz le 12 décembre ; de son côté, Max-Emmanuel, sentant le prix qu’on attachait à ce détail secondaire, ne voulait pas céder sans compensation : « J’insiste pour qu’on congédie M. Villars, écrivait Kaunitz à Strattmann le 23 décembre; je crains pourtant de ne rien obtenir que l’alliance ne soit faite; » et il priait sa cour de le mettre immédiatement en mesure de conclure. Impatient, lui aussi, d’une solution, et certain d’obtenir ce qu’il désirait, Max-Emmanuel se décida enfin à donner à l’empereur la satisfaction qu’il demandait : la lettre qu’il écrivit à cette occasion mérite d’être traduite au moins dans ses parties essentielles :


Munich, 27 décembre 1688.

Je me suis tout particulièrement consolé en apprenant la satisfaction avec laquelle Votre Majesté Impériale a daigné accueillir mes récentes déclarations. Elle peut être assurée que je n’ai jamais eu d’autre pensée que de m’attacher à son service et de me consacrer patriotiquement aux intérêts de l’Empire commun : les circonstances ne m’ont pas permis, jusqu’à présent, d’exprimer publiquement ces sentimens; je ne pouvais le faire sans exposer mon pays à une ruine certaine et sans courir le risque d’être mis immédiatement dans l’impossibilité de prêter aucune assistance... Mais aujourd’hui que Votre Majesté me donne l’assurance écrite qu’elle me tendra sa main puissante, que les contingens de la Franconie et de la Souabe me sont offerts, et que l’affaire peut être engagée de concert dans les meilleures conditions, je prouverai, autrement que par de vaines paroles, combien je suis impatient de repousser les injustifiables violences des Français, d’aider à protéger les pays d’Empire contre des malheurs immérités, et de couvrir, avec autant d’ardeur que n’importe quel général, à l’aide des troupes qui me seront confiées, les territoires et les villes appartenant en propre à Votre Majesté. Il n’y a pas un instant à perdre; aussi je prie Votre Majesté de donner les ordres nécessaires aux régimens qui me sont destinés, ainsi qu’aux régimens de Stahrenberg et de Stadel, afin qu’ils soient réunis le plus tôt possible, tout délai étant préjudiciable... Votre Majesté n’aura pas à se repentir de la confiance qu’elle me témoignera en me donnant le commandement de ces troupes: je compte sur un corps solide au printemps; et, pour éviter tout retard, je m’en remets dès à présent au traité d’alliance,