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leur premier établissement sur les côtes de l’Indoustan, n’avaient été dans une situation plus précaire. Le Sénégal figurait sur les états officiels comme une possession française, comme une province de notre empire colonial ; mais en réalité nous n’y étions ou nous n’y semblions que tolérés et nous passions aux yeux des indigènes pour de simples mercanti.

C’est seulement vers 1854 que nous avons commencé à nous relever. Sur des ordres venus de la métropole, le capitaine Protêt, alors gouverneur, remonta le fleuve et, à Podor, jeta les fondations d’une forteresse dont M. Faidherbe, alors capitaine du génie, dirigea les travaux. Puis, comme on avait à se plaindre des gens du Dimar, on enleva d’assaut leur tata ou village fortifié de Dial match.

A une nouvelle politique il fallait un nouveau représentant. M. Faidherbe, promu au grade de commandant, fut nommé gouverneur. Les instructions qu’il reçut étaient des plus catégoriques :


Nous devons dicter nos volontés aux chefs maures pour le commerce des gommes. Il faut supprimer les escales en 1854, employer la force si l’on ne peut rien obtenir par la persuasion. Il faut supprimer tout tribut payé par nous aux états du fleuve, sauf à donner, quand il nous plaira, quelques preuves de notre munificence aux: chefs dont nous serons contens. Nous devons être les suzerains du fleuve. Il faut émanciper complètement le Oualo en l’arrachant aux Trarzas et protéger en général les populations agricoles de la rive gauche contre les Maures. Enfin, il faut entreprendre l’exécution de ce programme avec conviction et résolution.


C’est à cette œuvre que M. Faidherbe consacra neuf années de sa vie (de décembre 1854 à décembre 1861 et de juillet 1863 à juillet 1865.) Le programme comprenait deux points essentiels : 1° affranchir notre commerce des vexations des Maures, délivrer la rive gauche de leurs incursions et les cantonner sur la rive droite ; 2° faire sentir notre autorité aux populations ouolofes et peuhles de la rive gauche et dégager nos forts.

La guerre contre les Maures commença en mars 1855. Des propositions avaient été adressées au roi des Trarzas : suppression des escales, suppression des coutumes, renonciation au Oualo, cessation des pillages sur la rive droite. Le roi fit répondre au gouverneur :


J’ai reçu tes conditions, voici les miennes : augmentation des coutumes des Trarzas, des Braknas et du Oualo ; — destruction immédiate de tous les forts bâtis dans le pays par les Français; — défense à tout