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I

Toute la partie occidentale de l’île est habitée par les Sakalaves, peuple d’origine africaine, formant deux grandes agglomérations cantonnées sur le littoral nord et sud de l’île et tout à fait indépendantes l’une de l’autre, Bien qu’elles fussent naguère gouvernées par des dynasties issues d’une souche commune : les Sakalaves du nord occupaient le pays désigné sous le nom de royaume de Bouéni, et le pays des Sakalaves du sud formait le royaume de Ménabé. Nous n’avons à nous occuper ici que des Sakalaves du nord, dont le pays correspond à peu près au territoire dont le protectorat est aujourd’hui réclamé par la France.

En 1837, après une longue série de défaites que leur avaient infligées les Hovas, les Sakalaves du Bouéni, dans l’espoir d’échapper aux poursuites des vainqueurs, s’étaient réfugiés en grand nombre sur l’île de Nossi-Comba, entraînant dans leur fuite leur jeune reine Tsiouméik, âgée de quatre ans seulement, et qu’ils avaient élue l’année précédente. Une flottille, partie de Majunga, les y poursuivit ; mais la constitution topographique de l’île en rend l’attaque très difficile et très périlleuse pour les assaillans ; les Hovas renoncèrent à débusquer les Sakalaves de leur retraite et retournèrent à Mourounsang, où ils élevèrent un fort. La population qui vivait sous l’autorité nominale de Tsiouméik se fractionna en plusieurs groupes : les uns se retirèrent plus au nord ; d’autres, lassés de ces luttes impuissantes, qui ne leur apportaient, en définitive, qu’un surcroit de misères, se résignèrent à accepter le joug et restèrent avec leurs chefs, auprès des Hovas, à Mourounsang ; d’autres enfin, au nombre de 7 ou 8,000 individus, se répartirent sur les îles de Nossi-Bé et de Nossi-Comba, et aussi sur la partie de la Grande-Terre située en face de ces îles (baie de Bavatoubé).

La reine Tsiouméik, de retour à la Grande-Terre, y vécut quelques mois en paix ; mais la proximité des Hovas ne laissait pas que de lui inspirer de vives appréhensions, et, dans sa détresse, la jeune reine et ses chefs eurent l’idée de réclamer l’assistance de l’iman de Mascate, qui résidait alors à Zanzibar, et près duquel Audrian-Souli, le dernier roi du Bouéni, avait tenté jadis une démarche analogue, qui n’avait pas alors abouti au résultat désiré, les conditions imposées par le souverain arabe ayant été jugées inacceptables. Après de longues et laborieuses négociations engagées, d’une part, entre Seyd-Saïd, sultan de Zanzibar, et, d’autre part, la reine Tsiouméik et Tsimiare, roi des Antaukares, qui, de son