Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 72.djvu/659

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

côté, cherchait également à secouer le joug des Hovas, il intervint, en décembre 1838, un traité par lequel Tsiouméik et Tsimiare plaçaient leurs pays respectifs sous la suzeraineté de Seyd-Saïd ; celui-ci, en retour, s’engageait à leur prêter sa coopération armée pour les aider à chasser les Hovas de leurs pays, sous la condition du paiement d’un tribut annuel.

Les choses étant ainsi arrêtées, Seyd-Saïd résolut, peu de temps après, de donner au traité un commencement d’exécution et expédia à Madagascar un de ses bâtimens de guerre, la corvette le Sultan, avec le matériel nécessaire à l’armement de deux forts qu’on se proposait de construire, la corvette se rendit, à la fin de décembre 1838, dans la haie de Bavatoubé, non loin de la résidence actuelle de la reine, où l’un des deux forts projetés devait être établi, et où les hommes de l’expédition, aidés par les Sakalaves, furent employés aux travaux préparatoires. Quelques mois après, les Hovas de Mourounsang attaquèrent à l’improviste les Sakalaves groupés autour de leur reine, qui faillit rester entre leurs mains, et ne se crut en sûreté que lorsqu’elle fut conduite à bord du Sultan. Les Hovas furent moins heureux lorsqu’ils entreprirent de troubler les travaux commencés par les Arabes ; ceux-ci les repoussèrent vigoureusement et les refoulèrent sur leur poste de Mourounsang. Mais c’est à ce médiocre succès que devaient se borner les avantages que les Sakalaves retirèrent de l’intervention armée de Seyd-Saïd ; en effet, soit qu’il eût été dégoûté par le spectacle de la désunion qu’il voyait régner parmi les chefs, ainsi que pur l’expérience qu’il put acquérir de leur inaptitude absolue dans les choses de la guerre, soit qu’il dût se conformer aux instructions qu’il avait reçues, le commandant arabe abandonna brusquement les travaux commencés, fit embarquer ses troupes et retourna à Zanzibar.

Ainsi abandonnés à eux-mêmes par suite du départ du navire et des troupes arabes, et ne se sentant plus en sûreté sur la Grande-Terre, où d’un moment à l’autre la garnison de Mourounsang pouvait venir les surprendre, les sujets de Tsiouméik se décidèrent, dans le mois de mai 1839, à se réfugier en masse sur Nossibé, dont la population se trouva du coup augmentée de 5 à 6,000 âmes ; presque en même temps, Tsimiare, roi dépossédé d’Ankara, suivi de ses adhérens, émigrait dans l’île de Nossi-Mitsiou ; à partir de ce moment, les Hovas restèrent les maîtres incontestés de tout le nord-ouest de l’île.

Quelques mois s’écoulèrent ainsi, et Seyd-Saïd ne témoignait pas qu’il fût disposé à poursuivre l’exécution du traité qu’il avait souscrit. Les Sakalaves de Nossi-Bé vivaient toujours dans l’appréhension d’une attaque de la part des Hovas, d’autant plus à craindre que les plages découvertes de l’île la rendent partout d’un abord