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il y a plus de deux siècles, a ouvert un tel horizon ! Ses vues intuitives illustrent en quelque sorte l’histoire même des progrès de la pensée humaine, en même temps qu’elles font ressortir la vigueur d’esprit de ce spéculatif audacieux. Comme s’il n’était pas assez de tant d’autres titres qui le recommandent aux siècles futurs, et malgré des erreurs, qui sont de son temps et de l’humanité, Descartes nous apparaît comme un initiateur de ces sciences que nous nommons aujourd’hui cosmologie et géologie. Dans nos jours d’activité fiévreuse, où chacun poursuit ses recherches sans s’inquiéter toujours de ceux qui ont frayé les voies, il paraît équitable et opportun d’exercer une sorte de revendication, en signalant à la reconnaissance de tous l’homme qui sut pénétrer d’un même regard le monde de la matière et celui de l’esprit.

Les analogies que nous avons signalées entre les météorites et les régions profondes de notre globe, témoignent de l’identité des actions chimiques, lors de la formation d’astres bien éloignés les uns des autres. En effet, un minéral rappelle généralement, d’une manière précise, les circonstances qui l’ont fait naître ; ou peut dire qu’il raconte lui-même son origine, surtout lorsque ce minéral peut être reproduit expérimentalement. Voyons donc comment le raisonnement, assisté de l’expérience, peut nous reporter à la formation même des astres dont nous possédons des parcelles. La silice ou acide silicique est un agent chimique dont l’énergie devient surtout considérable dans les hautes températures ; aussi est-il l’élément caractéristique de nombreux produits engendrés dans les foyers de l’industrie, tels que le verre, les scories de forges, les laitiers de hauts fourneaux, comme il est celui des laves des volcans. Tous les silicates artificiels et naturels, dépourvus d’eau ou anhydres, dénotent une température élevée qui a présidé à leur formation.

Supposons que le silicium et les métaux n’aient pas originairement été combinés avec l’oxygène, comme ils le sont aujourd’hui, soit qu’au sein du chaos primordial ces divers corps ne se fussent pas suffisamment rapprochés, soit plutôt que leur température ne fut pas encore assez élevée pour leur permettre d’entrer en combinaison. Dès que l’oxygène parvient à agir, il s’unit d’abord aux élémens pour lesquels il a une affinité prédominante, premièrement au silicium et au magnésium, puis au fer et au nickel, et, si ce gaz n’est pas en excès, il laisse un résidu métallique composé des corps les moins oxydables. Du fer et du nickel doivent donc nécessairement rester à l’état libre, disséminés au milieu des silicates pierreux. Or c’est exactement ce qu’on observe dans les météorites. C’est aussi ce que confirme l’expérience. En me plaçant dans les conditions qui viennent d’être énoncées, j’ai obtenu