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du chef défunt, l’autre Maunga-Lei, de l’opposition, prétendaient au titre de Maunga tout court et au pouvoir suprême dans la tribu de Pango-Pango. Quant à la question de droit, je ferai comme l’officier anglais, qui, envoyé pour mettre fin aux troubles, déclara dans son rapport qu'il lui semblait difficile de se former une opinion sur la validité des titres de chacun des candidats. Les événemens, plus simples que la question de droit, donnent une idée de l’origine de ces guerres et de la manière dont elles sont conduites. Maunga-Mauuma attaqua et brûla une partie de Pango-Pango, tua quelques guerriers et coupa un certain nombre de cocotiers, après quoi Maunga-Lei se rendit avec les siens au village de Fango-Tongo, où il fit absolument la même chose. Une douzaine de guerriers restèrent sur le carreau. Ln trader norvégien et sa femme, une indigène, qui y habitent, n’échappèrent à la mort qu'en se sauvant à la nage. Ils trouvèrent asile auprès d’un trader anglais, marié à une Tahitienne et occupant une hutte au bout d’une petite langue de terre. A l’exception d’un missionnaire catholique, qui réside à Leone sur la côte méridionale, ces deux hommes sont probablement les seuls blancs établis dans l’Ile. Ils trafiquent tous deux pour la Compagnie hambourgeoise.

Dans l’archipel de Samoa, l’épidémie la plus contagieuse est la guerre. Le roi Melietoa, dont nous avons fait la connaissance dans sa résidence près d’Apia, prit peur et, sur sa demande et, je pense, sur la demande de trois consuls, le capitaine Aukland, du bâtiment de guerre britannique Miranda, se rendit ici, embarqua, pour les remettre au roi, qui les retient encore prisonniers, les deux chefs ennemis et rétablit ainsi une paix » boiteuse et mal assise. »

Tout ceci me parait peu émouvant. Je ne forme de vœux pour aucun des deux rivaux et leur captivité me laisse froid. Je n’ai pas même une larme à donner aux dix ou douze braves tombés sur le champ d’honneur. Ce qui m’intéresse, c'est l’origine de la querelle et l’appel fait à l’intervention étrangère.

Les questions de succession entre chefs de tribu se reproduisent dans l’ordre naturel des choses. Aucun chef n’étant assez fort pour imposer aux deux parties contendantes une solution à l’amiable, ces querelles sont nécessairement vidées par les armes. Dans ces cas, les résidons européens, s’il s’en trouve dans la localité, courent les plus grands risques. Y a-t-il dans le voisinage un bâtiment de guerre de n’importe quel pavillon, anglais ordinairement, quelquefois français ou allemand, très rarement américain, il est appelé ou il doit venir sur l’initiative de l’officier qui le commande et qui ne peut assister les bras croisés à des scènes de pillage et de massacres. Il arrive donc et rien de plus facile que de rétablir la paix pour le quart