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position demande à être définie. Ici même elle comportait des difficultés d’un ordre spécial, tenant à l’origine lacustre des lits à interpréter, puisque les mollusques d’eau douce, vivans ou fossiles, offrent cette particularité de ne se distinguer les uns des autres que par des nuances trop délicates pour être aisément perçues. Jusqu’alors, on peut le dire, les fossiles de cet ordre avaient été l’objet d’une étude superficielle qu’il s’agissait de reprendre et de compléter. C’est encore à M. Matheron que revient le mérite d’avoir collationné ces archives : après avoir démontré que, dans les dépôts lacustres du sud-est de la France, ni les gypses, ni les lignites, ni les gisemens de plantes ne se correspondaient nécessairement ; que, plus anciens ou plus récens, selon les cas, plus rarement parallèles et contemporains, leur distribution ne présentait rien de constant, il arrêta le premier les termes d’une chronologie raisonnée des événemens physiques et des mutations organiques dont la Provence des lacs avait été le théâtre, d’un bout à l’autre de la période et jusqu’au moment de l’invasion de la mer miocène.

L’examen comparé des animaux et des plantes de chaque assise a fourni les élémens de cette évocation du passé, qui ne saurait être trompeuse, tellement les données en sont sérieuses et attentivement combinées. — Un ossement authentique de paléothérium, remis aux mains de M. Matheron, est venu un jour, par exemple, lui révéler l’ancienneté relative des lignites de Saint-Zacharie, vis-à-vis de ceux de Manosque dont la flore, nettement aquitanienne, est par conséquent plus récente. Les gypses de Manosque, de beaucoup inférieurs aux lignites de cette localité, inférieurs également à des lits à coquilles oligocènes, viennent très naturellement se ranger au niveau des lignites de Saint-Zacharie mentionnés ci-dessus, au niveau aussi des marnes de Gargas, avec ossemens de paléothérium ; mais il existe, au-dessus de ces marnes de Gargas, des lits à cyrènes « très caractéristiques, » et ces mêmes lits surmontent ou couronnent le groupe entier des gypses d’Aix, tandis que les gypses de Gargas reposent sur les cyrènes et sont par conséquent sensiblement plus modernes. Les plantes contenues dans ces derniers gypses confirment pleinement les données tirées de leur situation stratigraphique, et leurs affinités botaniques viennent à l’appui de leur attribution oligocène, présumée d’après la seule situation des couches. On voit par là le secours mutuel que se prêtent les deux branches de la science géologique, tour à tour invoquées, alliance si bien exprimée par le terme de « paléontologie stratigraphique, » qui s’applique justement aux résultats des deux méthodes d’exploration, heureusement combinées.

Laissons maintenant les procédés techniques pour nous en tenir aux seules généralités ; pénétrons à la suite des auteurs au sein de