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d’Egypte ou d’Assyrie. Mais elles prouvaient par des résultats frappans que le sous-sol de la Grèce devait être exploré et qu’on avait lu certitude de ne perdre, à le remuer, ni son temps ni son argent.

À cette époque, se continuaient sur une foule de points en Occident d’autres recherches, très fructueuses en Danemark, en Suisse et en Italie, et qualifiées de préhistoriques. En France, l’empire avait créé, pour l’histoire de César, une collection d’antiquités qui furent réunies à Saint-Germain-en-Laye. Grâce à l’activité et à la science solide de son directeur, M. Al. Bertrand, ancien membre de l’école d’Athènes, la collection gallo-romaine devint bientôt un musée préhistorique. Ce musée est aujourd’hui l’un des plus importans, sinon le premier de toute l’Europe. Le moment était donc venu où les pays grecs devaient être fouillés à leur tour. C’est le docteur Schliemann qui le premier y fit de grands déblaiemens. Comme la Revue en a fait connaître en leur temps les résultats, nous n’avons pas à revenir sur les fouilles de Troie et de Mycènes; Nous devons toutefois consigner ici que celles de Troie ont été reprises en 1879, avec ma collaboration et celle du docteur Virchow. Leurs nouveaux résultats sont exposés en anglais dans l’ouvrage intitulé Ilios publié en 1880, et en français dans une édition récemment parue chez M. Didot. Quatre autres grandes fouilles ont été entreprises sur le sol grec, sans parler de celles de M. A. de Rothschild à Milet. Ce sont celle d’Olympie, faite par les Allemands avec des fonds prélevés sur l’indemnité de guerre ; celle d’Eleusis, par la société archéologique d’Athènes; celle de Délos, par l’École française avec la collaboration de notre Académie de France à Rome; enfin celle de Tirynthe par le docteur Schliemann.

Les résultats de ces vastes et coûteuses excavations sont doubles. Elles rendent à la lumière des constructions cachées sous terre ou totalement inconnues, même aux anciens. En second lieu, elles enrichissent nos collections d’une foule d’œuvres d’art et d’objets usuels, qui nous font pénétrer dans la vie d’antiques générations, quelquefois même de peuples entièrement disparus. Qui connaissait, autrement que de nom ou par les livres, les Phéniciens, les Pélasges, les Troyens, les rois de Mycènes et tant d’autres? Nos musées nous montrent aujourd’hui les armes qu’ils ont tenues, les ustensiles dont ils se sont servis, les parures dont ces rois ou leurs femmes ont orné leurs vêtemens, leurs doigts et leurs cheveux. Le pic rencontre aussi quelquefois la maison du pauvre. A Santorin, feu Gorceix[1] en a dégagé trois ; elles avaient été ensevelies sous plusieurs mètres de pierres ponces lancées par le volcan qui fit

  1. M. Gorceix est mort directeur de l’école des mines au Brésil.