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d’une discussion. Sur la proposition de M. Alexander Stephens, l’ancien vice-président de la confédération sudiste, on passa tout de suite au vote, et le bill eut plus des deux tiers des voix dans les deux chambres. Les silvermen n’avaient certes pas obtenu tout ce qu’ils voulaient, mais ce qu’ils tenaient était déjà de telle valeur qu’ils pouvaient s’en contenter et devaient mettre tous leurs soins à le conserver. Ils ont su maintenir intacte leur alliance avec les intérêts agricoles de l’Ouest et du Sud, et, depuis 1878, il ne s’est pas trouvé une seule fois, dans la chambre des représentans, une majorité près de laquelle une proposition de rappel ou de suspension de la loi Bland eût la moindre chance de succès.


IV.

Les secrétaires du trésor ont, depuis 1878, fidèlement appliqué les clauses du silver Bland bill. La constitution fédérale a fait du président et de ses conseillers les exécuteurs légaux des volontés du congrès. Un ministre n’a pas à poser à Washington la question de confiance; il n’est responsable que devant le président et n’a point de rapports directs avec la représentation nationale. Rien ne l’oblige à se retirer, parce qu’une loi qui lui déplaît ou lui paraît mal conçue a été votée au Capitole. Il reste à son poste et entoure l’application de la loi de toutes les précautions qui lui paraissent de nature à en atténuer les conséquences fâcheuses. C’est ce qu’ont fait M. Sherman et les secrétaires qui ont dirigé après lui les finances fédérales. Aucun d’eux n’était partisan de la loi Bland ; l’un après l’autre ils ont insisté tous les ans, dans le rapport traditionnel de décembre au congrès, sur les raisons qui leur faisaient tenir pour désirable qu’elle fut abrogée. Mais le congrès restant sourd à ces instances, il a fallu passer outre. Sous les présidences républicaines de MM. Hayes, Garfield et Arthur, aussi bien que depuis l’entrée en fonctions du président démocrate actuel, M. Cleveland, le trésor a acheté chaque mois pour 2 millions de dollars de lingots d’argent. C’est le minimum fixé par la loi Bland. Les partisans de l’argent n’ayant pas encore eu jusqu’ici accès au pouvoir exécutif, jamais il n’a été usé de l’autorisation d’aller jusqu’au maximum, 4 millions dols. A raison de 2 millions de dollars par mois, soit 24 millions par an, les lingots achetés par le trésor ont été transformés en pièces d’argent représentant une valeur nominale annuelle de 27 à 28 millions de dollars. En huit ans, il a été ainsi frappé 220 millions de dollars, soit bien près de 1,200 millions de francs.

En dépit des restrictions imposées par la loi Bland au monnayage, on voit que les meneurs de l’agitation silverite en 1878 n’ont pas