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l’attention du parlement. » En présence de semblables déclarations, n’est-il pas permis d’élever un doute sur le résultat fiscal de ces innovations et, par conséquent, sur l’équilibre du budget ? Nous arrivons au point le plus délicat, aux réductions qui auraient été obtenues des divers départemens ministériels, par rapport à 1886, et qui sont évaluées tantôt à 72 et tantôt à 74 millions. Tout d’abord, ceux qui se rappelleront qu’il y a deux ans la commission du budget, par l’organe de M. Jules Roche, se vantait d’avoir réalisé 60 millions d’économies dans le budget de 1885 et qu’elle s’est fait honneur d’avoir introduit de nouvelles économies dans le budget de 1886, seront conduits à penser que, si on a pu encore retrancher des dépenses 72 ou 74 millions, il fallait qu’on eût antérieurement grossi le budget de 150 millions de crédits inutiles. Examinons ces économies et voyons si elles méritent ce nom.

On avait, en vue des élections, si largement doté les chemins vicinaux dans le budget de 1885, qu’au 1er janvier 1886 il demeurait 15 millions non employés : comme le budget de 1886 a été pourvu, on fait profiter le budget de 1887 de ces 15 millions, qui représentent un virement ou un transfert de crédit beaucoup plus qu’une économie. Au ministère de la guerre, on trouve 7 millions en moins pour les vivres et les fourrages, autant pour la solde des troupes, 2 millions pour l’artillerie, 1 million pour l’enceinte fortifiée de Lyon. A part cette dernière réduction, qui est facilement réalisable, les autres ne sont-elles pas de la nature de ces fausses économies signalées par M. Léon Say et même par M. Dauphin : ne sont-ce pas là de ces dépenses qui ne disparaissent du budget que pour reparaître sous la forme de crédits extraordinaires ? On en peut dire autant des 6 millions retranchés sur les constructions, navales et les approvisionnemens de la marine. La diminution de 18 millions annoncée sur le ministère des travaux publics porte uniquement sur les dépenses qui étaient défrayées par l’emprunt et non sur celles qui étaient inscrites au budget ordinaire : c’est à tort qu’elle figure comme une économie réalisée sur le budget précédent. On est donc autorisé à craindre que l’événement ne justifie pas les espérances du ministre. Il en est de même du calcul des recettes. En effet, si l’on a réduit certaines évaluations pour les ramener au niveau des résultats réalisés en 1885, cette réduction a été limitée à l’enregistrement, au timbre, aux douanes, aux sucres, aux forêts ; elle n’a pas été étendue aux autres sources de revenu : on prévoit, au contraire, pour 1887, par rapport à 1886, une plus-value de 4 millions sur les contributions directes et taxes assimilées, et de 46 millions sur les contributions indirectes. Or, les résultats des sept premiers mois de l’année actuelle ne justifient pas cette confiance : les