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les actions et relevé subitement leurs cours au moment où ces cours étaient au plus bas. C’est ce qui se produisit en 1868, pour la compagnie de Yellow-Jacket, dont les actions délaissées se relevèrent tout à coup à la suite de la rencontre d’un de ces nids de minerai dont, pendant plusieurs semaines, on tira des millions.

Sur ce plateau aride et dénudé du Nevada, sur cette étroite bande de terre de 500 mètres de largeur sur 4 kilomètres de longueur, l’industrie a accumulé les découvertes et les procédés les plus récens de la science, ses conquêtes les plus merveilleuses, à côté d’un luxe intelligent et pratique inconnu partout ailleurs. Les précautions les plus minutieuses pour protéger la vie des ouvriers, les appareils les plus ingénieux pour faciliter les travaux, pour la descente et la montée des mineurs, pour l’épuisement des eaux, y sont mis en usage. De puissantes machines à vapeur font mouvoir les pompes, les ventilateurs, les cages d’extraction. Les galeries, vastes et soigneusement aérées, solidement étayées, sillonnées en tous sens par des wagonnets, amènent l’air respirable jusqu’aux chantiers les plus éloignés. Les boyaux d’extraction, une fois épuisés, sont immédiatement remblayés avec des roches pour prévenir tout tassement. Le pays ne produisant rien, il faut tout y amener : la houille pour les machines, les étais de soutènement. Les puits atteignent une profondeur de neuf cents pieds. D’immenses nappes d’eau souterraines semblaient devoir empêcher de pousser plus avant, mais un Américain, M. Sutro, a conçu l’idée d’un gigantesque tunnel de plus de 20,000 pieds de long, qui, assurant l’écoulement, permet de suivre le filon jusqu’à 2,000 pieds de profondeur. Ce travail a coûté plus de 10 millions.

Le filon de Comstock dépasse en richesse les trois mines d’argent les plus renommées : celles de la Veta-Madre de Guanajuato, de la Veta-Madre de Zacatecas, au Mexique, et de Potosi, au Pérou. La première a cependant donné, en trois siècles, 4 milliards ; la seconde, 3 milliards 330 millions ; la troisième, enfin, 6 milliards, soit une moyenne, pour cette dernière, de 20 millions par an. Dans les dix premières années de son exploitation, le filon de Comstock a donné 675 millions, soit une moyenne annuelle de plus de 67 millions. Si l’on tient compte, en outre, de ce fait que, dans les mines d’argent de Comstock, aussi bien que dans l’exploitation des mines de quartz aurifère, le rendement moyen du traitement à l’usine n’est que des deux tiers du titre, ce qui revient à dire que 33 pour 100 de l’or ou de l’argent est perdu, on se rendra compte de l’étonnante richesse de ce filon, qu’un heureux hasard révéla à deux mineurs.

Si une pareille découverte était bien faite pour encourager les prospecteurs à se lancer encore plus avant à la recherche de nouveaux gisemens, elle était aussi de nature à surexciter toutes les