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Les grandes panégyries à effet, les missions dans le genre que depuis les jésuites imitèrent, terminées par une scène d’apparat, des sacrifices et un pacte solennel, étaient bien dans le goût juif. Une foule d’histoires légendaires qu’on rapportait au temps de Moïse et de Josué portaient les imaginations à se complaire en des scènes de berith ou alliances, qu’on supposait avoir été le point de départ d’ères nouvelles dans les relations de Iahvé et de son peuple. Esdras parait avoir médité un éclat de ce genre. Le septième mois (tisri), répondant à l’équinoxe d’automne, amenait la fête des tentes, où tout Israël passait quelques jours sous des buttes de feuillage, en plein air. Le peu d’étendue du pays occupé par les colons rapatriés rendait facile la concentration de presque toute la nation sur un seul point. Cette circonstance prêtait merveilleusement au grand coup qu’Esdras voulait frapper. En une année qu’on peut supposer par approximation avoir été l’an 450 avant Jésus-Christ, averti sous main par le scribe agitateur, presque tout l’Israël nouveau se trouva réuni à Jérusalem. Le centre de la panégyrie était sur le large espace ouvert qui s’étendait près de la porte de l’enceinte du temple connue sous le nom de porte des Eaux. Comme le rempart n’existait pas, la foule pouvait se répandre aux alentours (vers le seraï actuel).

Devant la foule assemblée, Esdras parut, tenant le volume de la Thora. Tous les doutes de la science seraient levés, les problèmes les plus importans de la critique seraient résolus, si nous pouvions voir le volume qu’il tenait et en examiner la composition. A défaut de ce miracle, contentons-nous de traduire le récit que contenait l’ancienne Vie d’Esdras.


Ezra le prêtre apporta donc la Thora en présence de l’assemblée, composée d’hommes, de femmes et de tous ceux qui étaient capables de comprendre, le premier jour du septième mois. Et il en fit la lecture, devant la place qui est en face de la porte des Eaux, depuis le lever du jour jusqu’à midi, en présence des hommes, des femmes et de ceux qui étaient capables de comprendre, et les oreilles de tout le peuple étaient tendues vers le livre de la Thora. Et Esdras le sofer se tenait sur l’estrade de bois, qu’on avait dressée pour la circonstance, et se tenaient à côté de lui : Mattitiah, Séma, Anaïah, Ouriah, Helqiah, Maaseyah, à sa droite, et à sa gauche : Pedaïah, Misael, Malkiah, Hastun, Hasbaddana, Zakariah, Mesullam. Et Esdras ouvrit le livre aux yeux de tout le peuple (car il était élevé au-dessus de tout le peuple), et, quand il l’ouvrit, tout le peuple était debout. Et Esdras bénit Iahvé, le grand Dieu, et tout le peuple répondit : Amen ! Amen ! en levant les mains ; et ils s’inclinèrent et se prosternèrent devant Iahvé, la face