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Willis’s Room, les adhérens du parti libéral unioniste, qui compte soixante-treize représentans aux parlemens et dont les deux chefs sont toujours lord Hartington et M. Chamberlain. Ce dernier n’était pas encore rentré de son excursion sur le continent. Mais il a fait savoir à la réunion, par un télégramme, qu’il n’accepterait aucune réconciliation avec M. Gladstone aussi longtemps que cet ancien chef du parti libéral serait décidé à rompre l’unité de la Grande-Bretagne par la concession à l’Irlande de l’indépendance législative. M. Bright avait envoyé une lettre d’excuse, dont la lecture a été reçue par la réunion comme un réquisitoire accablant contre son ancien ami, traître aux véritables traditions du parti libéral. Lord Hartington a défini et expliqué en termes dont la netteté ne cédait en rien à l’énergie, la situation faite au parti libéral unioniste par les événemens scandaleux dont l’Irlande tait le théâtre. Cette situation ne prête à aucune équivoque. Il n’y a pas de rapprochement possible sur la question irlandaise avec les gladstoniens. Il faut donc que les unionistes, tout en consentant leur liberté d’action sur tous les points du programme libéral, dont ils n’ont rien à retrancher, agissent complètement d’accord avec le gouvernement tory pour les mesures à adopter et la politique à suivre en vue du rétablissement de l’ordre en Irlande. Le soir, au grand banquet qui a clos la conférence, M. Goschen a encore accentué la résolution des libéraux unionistes de ne pactiser à aucun degré avec les révolutionnaires irlandais ou avec leurs amis en Angleterre : « M. Gladstone nous a invités à nous joindre de nouveau à lui, à retourner à notre ancienne allégeance. Mais à qui veut-on que nous nous joignions maintenant? A l’ancien parti libéral? Non, car c’est nous qui sommes l’ancien parti libéral. On nous demande de nous joindre à la coalition Gladstone-Parnell-Labouchère-Dillon-O’Brien. Cela, nous ne le ferons jamais. Lorsque nous avons engagé le combat aux élections contre les libéraux gladstoniens, nous avions à défendre l’unité de l’empire. Aujourd’hui notre tâche s’est agrandie; nous avons en outre l’ordre social à défendre. »

Le marquis de Salisbury ne pouvait attendre de ses alliés du parti libéral unioniste une plus formelle déclaration d’appui et de concours pour la session qui allait s’ouvrir le mois suivant. La question paraissait définitivement tranchée contre M. Gladstone. Celui-ci cependant n’était pas plus disposé après le 7 décembre qu’auparavant, soit à se résigner à sa défaite, soit à renoncer, pour se rapprocher du pouvoir, à cette politique de home rule, qu’il considère comme seule capable de désarmer l’Irlande et de la réconcilier avec le régime de la loi. On ne saurait l’accuser de suivre d’un regard complaisant la campagne de spoliation de MM. Dillon, O’Brien et Cie. Ce serait lui faire gratuitement injure, mais il n’a