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d’Arc, insistaient pour retarder le départ de la colonne qui n’était, selon la saisissante expression du duc d’Orléans, que l’ébauche d’une armée. Les trois services, qui demandaient ensemble quinze cents mulets, n’avaient pu en réunir que quatre cent soixante-quinze, pas même le tiers.

En dépit de toutes les remontrances, le maréchal Clauzel mit son avant-garde en mouvement, le 8 novembre, sur Ghelma. Cette avant-garde, commandée par le général de Rigny, avait la composition suivante : un millier de spahis réguliers et auxiliaires ; le bataillon turc de Jusuf qu’il n’avait jamais pu mettre à plus de 300 hommes; 500 chevaux du 3e régiment de chasseurs d’Afrique ; 860 hommes du 1er bataillon d’Afrique et de la compagnie franche du 2e, sous les ordres du lieutenant-colonel Duvivier; l’effectif total était de 2,700 hommes. Le gros du corps expéditionnaire, sous le commandement du général Trézel, comprenait: le bataillon du 2e léger qui ne comptait que 375 baïonnettes, le 17e léger, le 59e, le 62e et le 63e de ligne, au total 4,650 hommes. En ajoutant 550 artilleurs, 510 sapeurs et mineurs, et 300 hommes environ des services administratifs, on trouvera le nombre de 7,400 Français et de 1,350 indigènes, relevé sur l’état de situation du 12 novembre. L’artillerie emmenait six pièces de campagne et dix de montagne, approvisionnées toutes ensemble, les premières à sept cent soixante-dix coups, les secondes à six cent soixante, trente-six fusils de rempart, ayant chacun deux mille coups à tirer, deux cents fusées de guerre, cinq cent mille cartouches et 200 kilogrammes de poudre de mine. Ce matériel était traîné ou porté par trois cent vingt-huit chevaux et mulets. Le service des subsistances avait chargé trois cent douze mulets de bât et treize prolonges; un troupeau suivait qui pouvait fournir cent quarante mille rations de viande fraîche. Outre les approvisionnemens charriés, chaque soldat était pourvu de sept jours de vivres portés dans le sac. Le total des chevaux de selle et des animaux de bât et de trait s’élevait au chiffre de 2,274.

L’avant-garde atteignit, le 10 novembre, le plateau de Ghelma. Elle y installa son bivouac, en arrière d’un ravin escarpé, près des ruines de l’ancienne Calama. Au moyen d’une coupure on réduisit de moitié l’immense espace embrassé par l’enceinte qui existait encore, flanquée de tours carrées, mais ouverte çà et là par des brèches qu’une végétation vigoureuse avait envahies; à l’intérieur, parmi les broussailles et les hautes herbes, gisaient des pierres de taille, quelques-unes couvertes d’inscriptions, des tronçons de colonne, des chapiteaux, débris et témoins de cette grandeur romaine dont le maréchal Clauzel aimait tant à invoquer le glorieux souvenir. Le 13, il quitta Bône, avec le duc de Nemours, le quartier-général et le gros de l’armée. Quoique le temps se fût