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l’expédition par des faits de guerre, elles étaient peu considérables : deux cents hommes hors de combat, dont vingt morts seulement.

Le duc d’Orléans avait été lui-même atteint par la maladie; le 14 décembre, il s’embarqua sur le Castor pour rentrer en France. Il partait emportant l’estime et la sympathie de tous ceux dont il venait de partager la fortune, depuis le maréchal jusqu’au simple soldat. « Le duc d’Orléans s’est très bien conduit dans tout cela, écrivait le lieutenant-colonel de Maussion, chef d’état-major de la division d’Oran, ne se mêlant ostensiblement de rien, fort poli pour tout le monde et fort brave. » — a Le prince est fort bien, écrivait de son côté La Moricière ; il porte bien l’uniforme, s’exprime facilement, a de l’aplomb, du coup d’œil et des idées. Il est instruit et supérieur à la moyenne de nos officiers généraux. Du reste il a fort bien pris avec l’armée et avec tout le monde sans exception. »


III.

L’expédition de Mascara, que les loustics de régiment et les beaux esprits d’Alger appelaient une mascarade, n’avait ni répondu aux grands espoirs du maréchal Clauzel, ni satisfait ses vastes desseins. Dans l’infini de sa confiance imaginative, il embrassait l’Algérie tout entière, envahie sur tous les points à la fois et conquise en deux coups, à supposer qu’une seule campagne n’y eût pas été suffisante. « Et d’abord, dans la province d’Oran, a-t-il dit lui-même, je voulais que nous eussions en notre puissance Mascara, Tlemcen, Oran, et pour compléter ces positions, Mostaganem, Mazagran, un camp à la Tafna et le camp du Sig, avec une colonne mobile de cinq mille hommes. Cela fait, cette province était enveloppée, dominée, soumise. Mascara en notre possession, Abd-el-Kader ou tout autre était rejeté dans le désert ; ce n’était plus qu’un chef d’Arabes errans. Tlemcen dans nos mains, il ne recevait plus ni armes, ni munitions, ni secours d’hommes du Maroc, et tous les efforts de cette puissance jalouse mouraient faute de pouvoir arriver jusqu’aux Arabes. Dans la province d’Alger et de Titteri, je voulais avoir, outre Alger, la ligne de Blida à Coléa, et deux postes avancés au versant du col de Ténia, Médéa et Miliana. Dans la province de Constantine, je voulais avoir Bougie, Bône, La Calle et Constantine. Quarante mille hommes suffisaient pour les deux campagnes, trente mille pour ces occupations et, deux ans après, vingt mille hommes dominaient complètement la régence. Cela fait, les beys nommés, établis, protégés par nous, auraient joint les troupes indigènes à nos troupes; bientôt on eût senti partout le poids de notre autorité, l’activité de notre surveillance. Alors l’Algérie devenait