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17e léger, un bataillon formé des compagnies d’élite du 2e et du 10e léger, les 18e et 63e de ligne, quatre compagnies de zouaves, deux compagnies du génie, le 2e régiment de chasseurs d’Afrique, les Douair et les Sméla ; dans la deuxième, sous le général d’Arlanges, le 1er bataillon d’Afrique et le 66e de ligne ; dans la troisième, le 11e de ligne seul. A chaque brigade était attachée une section d’obusiers de montagne. Il y avait de plus en réserve six pièces, dont quatre de campagne, une batterie de fusées de guerre, un équipage de pont et deux compagnies du génie. Les parcs et le convoi comprenaient une soixantaine de voitures et deux cents chameaux.

Partie d’Oran le 8 janvier à sept heures du matin, la colonne bivouaqua, le 12 au soir, sur les rives de l’Amighier, petit affluent de l’Isser. Dans cette marche de trente lieues, elle n’avait été retardée ni par les difficultés du terrain, beaucoup moins tourmenté que du côté de Mascara, ni par l’ennemi, qu’elle n’avait point vu : en fait, il n’avait pas été brûlé une amorce. Après le coucher du soleil, on aperçut, à l’est, des feux de bivouac en très grand nombre; à trois heures du matin, arriva un coulougli dépêché par Moustafa-ben-Ismaïl. Les nouvelles qu’il apportait étaient importantes : désespérant d’emporter le Méchouar, Abd-el-Kader, dans la nuit du 11 au 12, avait fait évacuer, de gré ou de force, la ville par tous les hadar, en leur persuadant que les Français n’y feraient pas plus de séjour qu’à Mascara; c’étaient les feux de leurs campemens qu’on voyait briller à deux ou trois lieues de distance. Le 13, après quelques heures de marche à travers un terrain dont la monotone aridité depuis Oran avait commencé, la veille à peine, à s’estomper de verdure, Tlemcen apparut comme une vision magique. Au premier plan, les bois d’oliviers, les vergers, les jardins ; au fond la montagne en gradins, les eaux tombant en cascades limpides de ressaut eu ressaut dans la plaine, au milieu la ville blanche avec ses mosquées et les murailles crénelées du Méchouar; à gauche Sidi-bou-Médine et Agadir, à droite les ruines et le minaret de Mansoura, tout s’encadrait mieux que dans la plus habile des compositions pittoresques, tout s’arrangeait à souhait pour le plaisir des yeux.

L’avant-garde venait de traverser le ravin d’Ouzidan, quand elle vit approcher une troupe de cavaliers ; c’étaient les principaux des coulouglis et les grands des Angad qui venaient, Moustafa-ben-Ismaïl en tête, saluer le général des Français. L’entrevue eut lieu sous les beaux oliviers qui bordent la rive du Safsaf. « Il y a quelques jours, dit au maréchal le vieux défenseur du Méchouar, j’ai perdu soixante de mes plus braves enfans ; mais en te voyant j’oublie mes malheurs passés. Depuis six ans, j’ai été souvent sollicité,