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avait rédigé en ces termes l’épitaphe du parti du centre : « Ci-gît le centre, qui ne fut jamais battu par ses ennemis, mais qui fut délaissé de ses amis. » — « Parlez mieux, lui a répliqué la Gazette de Cologne ; dites plutôt : Ci-gît le parti du centre, mort de la maladie guelfe. »


Heu ! præmatura consumptum morte quiescit
Hic Centrum, morbi victima guelfiaci.


Et, après avoir parlé latin, la Gazette expliquait en bon allemand que Léon XIII venait de délivrer les catholiques de la servitude où les retenaient quelques ambitieux sans scrupule, ennemis de l’empire et de toute autorité légitime : « Le guelfisme enseignait ses décevantes doctrines par la bouche de M. Windthorst ; la parole vient d’être rendue au peuple, à la noblesse et au clergé catholique. » Ce clergé a ressenti de cruelles perplexités. Il s’est trouvé deux évêques pour déclarer que tout commandement qui vient de Rome est sacré, et que, quoi qu’il en coûte, il faut s’y soumettre. Un autre, qu’on sollicitait de combattre la candidature de M. Windthorst, a répondu qu’en matière politique les opinions étaient libres, et que chacun doit suivre sa conscience. D’autres se sont tus. Peut-être pensaient-ils que les bergers qui font la paix avec le loup en lui livrant leurs chiens sont des imprudens et se préparent de cuisans repentirs.

Les raisons qui ont déterminé le saint-père sont faciles à comprendre et font honneur à son caractère apostolique, il lui a paru que le vote du septennat était propre à éloigner les dangers de guerre, à dissiper le sombre nuage qui pèse sur l’Europe depuis quelques semaines : « Si la loi est adoptée, est-il dit dans la lettre du cardinal Jacobini du 3 janvier, le danger d’une guerre prochaine sera évité, et le parti du centre aura rendu ainsi un immense service à sa patrie, à toute l’Europe, à l’humanité. » Léon XIII a trop de clairvoyance pour être absolument convaincu que le septennal, c’est la paix. Mais il sait que la Prusse est un pays où les conflits parlementaires trouvent quelquefois leur solution dans une guerre extérieure, que les gouvernemens qui ont un procès avec leur peuple peuvent être tentés d’y faire diversion en plaidant, l’épée à la main, contre leurs voisins. Nous lisions dernièrement dans les mémoires d’un diplomate saxon le mot d’un vieux général autrichien qui se plaignait que le prince de Metternich eût trop sacrifié au maintien de la paix : « Une bonne guerre en 1830 et même en 1840 aurait empêché les c… de 1848, » Le pape Léon XIII connaît trop les hommes pour ne pas savoir que certains politiques ont moins de répugnance que M. de Metternich pour les cures violentes, et il a jugé qu’un souverain-pontife remplissait son devoir en ôtant aux violens