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le ministre des finances, M. de Scholz, a soutenu énergiquement la cause de l’or, en affirmant que l’empire devait à son nouveau système monétaire une situation plus ferme et plus avantageuse parmi les nations commerçantes ; et comme on cherchait à dénaturer sa pensée, il a clôturé le débat en déclarant « qu’aucune des paroles prononcées par lui devant les chambres prussiennes ne devait être interprétée, par les partisans du double étalon, dans un sens favorable à leurs désirs. » La majorité de l’assemblée se prononça pour une enquête définitive, « non pas, dit-elle, pour encourager l’agitation bimétalliste, mais pour être mise en possession d’élémens complets et certains qui permissent de prendre position en pleine connaissance de cause. » Depuis lors, on n’a plus entendu parler de cette enquête. Au 13 mars dernier, la discussion du budget au Reichstag ayant fourni un prétexte pour réveiller la question, le docteur Jacobi, secrétaire de la trésorerie, éluda l’interpellation en disant qu’il lui paraissait inopportun et peu convenable d’émettre un avis à Berlin, tandis qu’une commission royale, à laquelle le gouvernement anglais attache une importance décisive, est en fonction à Londres. Il y a chez nous des financiers qui affirment que l’Allemagne est impatiente de s’associer à un effort international pour effectuer le relèvement de l’argent ; je les crois sincères, mais ils sont dans une grande illusion.


II

La réforme préparée à petit bruit et opérée résolument par l’Allemagne causa en Angleterre de la surprise et de l’inquiétude : c’était comme une sorte d’invasion dans le système qu’elle exerçait par privilège depuis plus d’un demi-siècle, et auquel elle devait, sans s’en rendre bien compte, une partie de sa prépondérance commerciale ; mais ce n’est pas seulement dans sa spécialité monétaire que l’Angleterre s’est sentie entamée, elle éprouve du côté de l’Asie des embarras qui seraient aujourd’hui sa préoccupation principale, si elle n’était pas aux prises à l’intérieur avec un danger flagrant.

Il n’est pas exact que le peuple indien ait une prédilection exclusive pour le métal blanc. Les différens états qui sont tombés successivement sous le joug britannique avaient autrefois des monnaies d’or et d’argent à des effigies particulières ; pour la roupie d’argent seulement, on comptait alors jusqu’à dix-sept variétés. Les inconvéniens de cette diversité, se firent sentir à mesure que les relations commerciales se développèrent. L’Angleterre, vouée à l’étalon d’or, réalisa la réforme monétaire en imposant à ses sujets indiens l’étalon unique d’argent. Le 1er septembre 1835, la compagnie souveraine mit en circulation, sous le nom de Company’s