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Ce don appartenant, ainsi qu’on le sait, très particulièrement aux Écossais, la répétition de ces oracles lugubres acquiert une importance historique, car ils éclairent les sentimens de l’Écosse presbytérienne pour cette race royale issue de son sein et suffisent à expliquer l’ardeur avec laquelle elle s’unit à l’Angleterre pour la combattre. Ce sont ces voyans écossais qui ont commencé, ce sont eux qui vont achever le court tableau que nous avons voulu présenter. Voici encore une de ces prophéties qui, pour l’exactitude, ne laisse rien à désirer, puisqu’elle s’est accomplie de point en point, « Sir William Dugdale m’apprit aussi ce qui suit sur le major (depuis lord) Middleton, qui se rendit dans les Highlands en vue d’y former un parti pour le roi Charles Ier. Un vieux gentilhomme, qui avait le don de seconde vue, vint et lui dit que la tentative était bonne, mais qu’elle serait sans succès, et qu’en outre ils mettraient le roi à mort. Il ajouta que diverses autres tentatives seraient faites, mais toutes en vain ; que son fils reviendrait et ne régnerait pas d’abord, mais qu’à la fin, cependant, il serait restauré. » Il est permis de croire que cette seconde vue écossaise consentit à s’assoupir quelque peu sous le prince voluptueux et finement politique dont nous venons de voir annoncer la restauration, car nous ne trouvons dans Aubrey aucun pronostic de ce genre concernant son règne ; mais, sous le court règne de Jacques II, elle se réveilla plus intrépidement visionnaire que jamais, seulement cette fois ce ne fut pas seulement à la personne royale que ses prophéties s’appliquèrent, ainsi qu’en témoigne le mélancolique fait suivant : « j’étais présent, écrit un des correspondans d’Aubrey, lorsque Archibald Macdonald prédit devant lord Grant, sa femme et quelques autres personnes, que le duc d’Argyle, dont on ne connaissait pas alors le lieu de résidence et dont on n’avait aucune nouvelle, arriverait dans les Highlands de l’ouest deux ans plus tard, qu’il y soulèverait une révolte, mais que les révoltés se diviseraient et se disperseraient, et que le duc serait par malheur pris et décapité à Édimbourg, où sa tête serait placée sur le Talbooth, comme y avait été celle de son père, toutes choses qui arrivèrent en 1685, date marquée par la prophétie. »