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la majeure partie. Aux termes de la circulaire ministérielle du 27 janvier 1887, ils doivent avoir lieu ce jour-là. de huit heures et demie du matin à deux heures de l’après-midi, du 1er octobre au 1er juin, dans toutes les écoles qui possèdent un cours complémentaire. Dans mon précédent article, j’ai prouvé, d’accord en cela avec tous les hygiénistes, qu’on ne pouvait pas impunément exiger d’un jeune homme plus de huit heures de travail intellectuel par jour ; il est plus déraisonnable encore d’en imposer dix ou onze à des petites filles qui n’ont pas quinze ans. C’est le même surmenage que dans les lycées, mais les inconvéniens sont encore aggravés par l’insalubrité du milieu, par la susceptibilité nerveuse et la débilité organique des sujets.

Des mobiles du même genre poussent les enfans des deux sexes dans cette voie de travail à outrance. Pour les jeunes gens, ce sont les diplômes à conquérir, ce sont les lauriers du grand concours, c’est l’entrée dans une école de l’état. Pour les jeunes filles, c’est te brevet d’institutrice, c’est l’admission dans les écoles normales. Le développement que l’enseignement primaire a pris, depuis quelques années, surtout dans les grandes villes, en a fait une carrière attrayante. C’est, pour les jeunes filles, un moyen de s’élever au-dessus de leur condition, de sortir de la situation d’infériorité dans laquelle se trouve leur famille, et de satisfaire les goûts de plaisir que tout contribue à développer en elles et qu’on semble prendre à tâche de surexciter.

Pour atteindre le but, il n’est pas d’efforts ni de sacrifices qu’elles ne fassent. Elles délaissent les soins du ménage et s’adonnent, avec une ardeur croissante, à ces études qui usent leur vie et qui le plus souvent ne les conduisent qu’à une déception. La carrière de l’enseignement, en raison même de l’attrait qu’elle excite, est aujourd’hui tellement encombrée que ce n’est plus qu’un leurre. Le 1er janvier de cette année, il y avait en France 12,741 jeunes filles aspirant aux fonctions d’institutrice, et dans ce nombre 4,174, c’est-à-dire près du tiers, pour le département de la Seine. Or, à Paris, on ne dispose, pour 1887, que de soixante places d’institutrices, dont vingt-cinq sont attribuées par avance aux élèves sortant de l’École normale. Le reste sera partagé entre les suppléantes à traitement fixe, qui ne sont pas moins de quarante. On peut juger par là du sort qui attend en province les 8,567 jeunes filles qui convoitent ces positions.

Le nombre toujours croissant des aspirantes a mis l’Université dans l’obligation de multiplier les difficultés. On a placé le concours à tous les degrés de l’enseignement, et les programmes sont devenus de plus en plus hérissés. Les jeunes filles qui aspirent à