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Francesco Orsini, duc de Gravina, le condottiere Vitellozzo Vitelli, Oliverotto tyran de Fermo, Gian Paolo Baglione de Pérouse, Petrucci de Sienne, Bentivoglio de Bologne, formèrent une alliance, réunirent 10,000 hommes et battirent à Fossombrone Ugo de Moncada, capitaine du Valentinois. Urbin et Camerino se soulevèrent et rappelèrent leurs seigneurs. Les conjurés se mirent en marche vers les Romagnes. Louis VII et Florence, qui refusa de concourir à la ruine de César, empêchèrent la catastrophe. C’est à ce moment que les Florentins envoyèrent Machiavel à Imola, afin de sonder les intentions du duc à leur égard. Le roi obtint une réconciliation apparente entre César, les condottières et les barons conjurés. Paolo Orsini, Vitellozzo, Oliverotto, reprirent leur service à l’armée ducale. Guidobaldo d’Urbin sortit de nouveau de sa ville après une courte restauration. Le cardinal Orsini, invité par des lettres paternelles du pape, revint à Rome. Bentivoglio refusa de faire ce dangereux voyage. Les condottières prirent en décembre 1502 Sinigaglia à son seigneur, Francesco Maria Rovere, l’héritier présomptif d’Urbin, qui avait onze ans. Puis ils invitèrent le Valentinois à entrer solennellement dans cette nouvelle conquête. Le 31, César arrivait à Fano, après avoir ordonné à ses capitaines de loger leurs troupes dans la campagne, afin qu’il pût prendre les quartiers pour son armée d’escorte. Ils obéirent, et attendirent presque seuls, à peine armés, le duc en dehors de la ville. Celui-ci les engagea à le suivre au palais de la ville, afin de conférer plus à l’aise. Oliverotto restait en arrière : César, d’un coup d’œil, lui dépêcha Micheletto, afin de le joindre à la compagnie. A peine fut-on entré dans les appartemens, que les anciens conspirateurs de la Maglione se virent arrêter. Tout aussitôt, les soldats du Valentinois mettaient la ville à sac. La nuit venue, Oliverotto et Vitellozzo, assis dos à dos sur deux chaises, furent étranglés ; Oliverotto pleurait et accusait son complice ; Vitellozzo suppliait qu’on lui fît parvenir, avant sa mort, l’absolution du saint-père. Petrucci avait pu s’échapper. Paolo Orsini et Gravina furent tués, le 18 janvier, à Castel-della-Pieve, par Micheletto. Le chevalier Orsini fut épargné et ne mourut assassiné que sous Jules II. Cependant, à Rome, la vengeance des Borgia suivait son cours avec une remarquable sûreté d’exécution. Le 3 janvier, le cardinal Gianbattista Orsini, à la nouvelle de la prise de Sinigaglia, s’était empressé d’accourir au Vatican pour féliciter le pape. En route, il rencontra le gouverneur de Rome, « qui feignit, dit Burchard, de l’accompagner comme par hasard. Arrivé au palais, le cardinal descendit de sa mule ; tous les chevaux et mulets de son cortège furent emmenés à l’écurie du pape ; dans la chambre du Papagallo, le cardinal se vit entourer de gens armés, et il pâlit. « Il fut aussitôt conduit à