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ici même, a jadis bien ingénieusement démontré qu’il y en avait peu dont l’influence eût été dans l’histoire aussi profonde et aussi durable[1]. On en retrouverait la trace encore jusque dans la Petite Fadette et dans la Mare au Diable.

Nous arrivons ainsi au XVIIe siècle ; et comme nous aurions trop à faire de signaler ici toutes les omissions, — j’entends les plus considérables, non pas celle de l’Artamène, de Mlle de Scudéri ou de la Pucelle, de Chapelain, mais celle de la Recherche de la vérité, de Malebranche ou des Sermons de Bourdaloue, — nous nous contenterons de quelques observations rapides sur les articles de Pascal, de Molière et de Bossuet.

Il y avait peu de choses à dire sur les Provinciales, et un peu plus sur les Pensées. Mais c’est ici qu’en vérité M. Le Petit aurait bien fait de s’en tenir à la description bibliographique du livre, et notamment de garder pour lui quelques phrases trop extraordinaires. Il nous apprend que, dans sa Vie de Pascal, Mlle Périer raconte que l’auteur des Lettres provinciales fut « converti » par la miraculeuse guérison de sa nièce ; ce qui déjà est d’un homme peu familier avec l’histoire de Pascal. Mais il continue, ou plutôt il récidive, et il écrit : « cette dame ajoute quelques détails sur de prétendus supplices que Pascal s’imposait pour éviter le péril des conversations mondaines, et parle d’une ceinture de fer pleine de pointes qu’il se mettait à nu sur la chair. Ce sont là des puérilités difficiles à admettre de la part d’un esprit aussi peu fanatique que celui de Pascal. » Par où l’on voit que M. Le Petit n’est pas en danger de jamais vêtir un cilice ; mais « puérilités » n’est-il pas admirable ? et les « prétendus supplices ? » et « cette dame ? » et cette façon aussi de parler de Pascal ? M. Le Petit en a une encore de parler « d’Artus Gouffîer, duc de Roannez, » qui l’achève de peindre ! Vignerod, dit Richelieu, et Bouchard, surnommé Montmorency !

Quant à la question même du texte imprimé des Pensées de Pascal, on sait qu’il en existe au moins trois éditions « originales » et légèrement différentes : l’une, datée de 1669, dont on ne connaît, dit-on, qu’un exemplaire, celui de la Bibliothèque nationale ; et deux, sous la date de 1670, l’une en 365 pages et l’autre en 334 seulement. L’exemplaire de 1669 doit être un exemplaire d’essai, de ceux que l’on soumettait, avant de livrer l’ouvrage au public, soit à la chancellerie, — Et non pas, comme le dit M. Le Petit, « à la censure du lieutenant de police, » — soit à l’approbation de l’autorité ecclésiastique, soit encore et tout simplement à la critique de ses amis. On connaît ainsi, sous la date de 1671, quelques exemplaires du livre de Bossuet : Exposition de la doctrine de l’église

  1. Voyez dans la Revue du 15 mai 1874 : le Lignon, les d’Urfé, le Château de la Bâtie et l’Astrée.