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des affaires de police et à nommer leurs officiers, en tant que cette dernière faculté n’est pas abandonnée à l’empereur par des conventions spéciales. Seule la Bavière s’est réservé, non pas une indépendance complète, mais l’administration et l’organisation de ses forces militaires, avec le droit de pourvoir aux commandemens supérieurs et l’obligation de se placer sous les ordres de l’empereur en cas de mobilisation.

S’agit-il d’ordonnances touchant l’administration de l’armée, la sanction en appartient bien aux gouvernemens particuliers, — on ne peut plus dire aux souverains ; — mais l’empereur en fixe le contenu et la matière. L’empereur, roi de Prusse, ordonne les mesures que les autres gouvernemens allemands sont tenus d’exécuter en vertu des dispositions expresses de l’article 61 de la constitution. Plusieurs états secondaires ont, d’ailleurs, immédiatement simplifié les choses, en abandonnant par des conventions spéciales l’administration de leurs contingens au roi de Prusse, par une incorporation pure et simple des troupes dans l’armée prussienne ; leur exemple a été suivi par la plupart des autres gouvernemens. Le prince-régent de Bavière ne vient-il pas d’adopter aussi le casque à pointe en place de la coiffure à chenille, distinctive du particularisme bavarois ? Auparavant déjà, le recrutement se faisait en Bavière d’après les règles fixées pour l’armée fédérale. Pour l’administration militaire, les royaumes de Bavière, de Saxe et de Wurtemberg ont seuls conservé leur ministère de la guerre et leur administration particulière à côté de l’administration du ministère prussien, qui s’étend à tous les autres états allemands.

L’empereur, en qualité de chef suprême de toutes les troupes de la confédération, disposant de la faculté de proclamer l’état de siège en cas de trouble à l’intérieur, comme de danger venant de l’étranger, exerce sur tous les pays de l’Allemagne une véritable dictature militaire. Seul il décide si la sécurité de l’empire est menacée. Par la proclamation de l’état de siège, le pouvoir exécutif passe aux mains des commandans militaires. Toutes les autorités civiles et communales sont tenues d’obéir aux ordres des chefs militaires, et des conseils de guerre peuvent remplacer les tribunaux civils dans certains cas. Ainsi, cette prérogative attribue à l’empereur des pouvoirs étendus bien au-delà du commandement supérieur des troupes, car elle touche toutes les autres branches d’administration et jusqu’au droit pénal.

Parce que l’armée prussienne avait l’organisation la plus parfaite, l’armée nationale de l’Allemagne unifiée a dû se modeler sur cette puissante organisation. Formée par les armes, la Prusse, redevable de sa grandeur à son armée, devait naturellement chercher à