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Caledonia et au Colombia succédèrent l’Hibernia et le Cambria, puis, dans ces derniers temps, le Gallia, de 4,800 tonnes, de 5,300 chevaux. Vapeur, à même de recevoir 300 passagers de cabine et 1,200 d’entrepont. Aujourd’hui, ces chiffres sont encore dépassés. Le Servia est de 8,500 tonneaux et de 10,500 chevaux-vapeur ; il a sept chaudières, alimentées par 39 foyers.

Dès 1852, ils possédaient une flotte de 13 bâtimens. En 1854, ils y ajoutaient le Jura et l’Etna, navires en fer, et, en 1862, ils substituaient l’hélice aux roues. Le prodigieux développement de leurs affaires décidait les associés à une décentralisation devenue nécessaire. MM. D. et G. Mac Iver restèrent à Liverpool ; MM. G. et J. Burns s’établirent à Glasgow ; MM. Cunard et Cie à Halifax, et Edouard Cunard et Cie à New-York, exerçant ainsi sur tous leurs ports d’attache une incessante surveillance et réalisant tous des fortunes considérables.

En 1859, sur la proposition de lord Palmerston, la reine Victoria conférait à M. Samuel Cunard le rang de baronet, dont son fils héritait à sa mort, en 1869.

Le principal titre de gloire du fondateur de cette compagnie puissante est moins encore l’impulsion considérable qu’il imprima à la navigation à vapeur que la sécurité complète qu’il sut donner, dès le début, à ces périlleuses traversées, l’ordre et la discipline qu’il réussit à introduire parmi son personnel, recruté avec un soin tout particulier, les précautions ingénieuses rigoureusement prescrites et scrupuleusement observées qui assurent le confort et la vie des passagers. Tout est prévu, tout est calculé en vue des éventualités même les plus improbables. Aucune dépense n’a été épargnée pour conjurer le péril ; le résultat de tant d’efforts a été une prospérité inouïe et une réputation bien méritée. Quand on se rend compte qu’en une année ces bâtimens effectuent, à l’aller et au retour, 246 traversées, qu’ils transportent un chiffre d’êtres humains équivalant à la population d’une grande ville, plus de 100,000, que chacun de ces navires suit une ligne exactement tracée, calculée de manière à prévenir toute collision dans les passages brumeux de Terre-Neuve, et que, depuis quarante années, ils n’ont perdu ni un navire ni un homme, on ne sait trop ce qu’il faut le plus admirer, de la sagacité de celui qui a poussé si loin la prévoyance, ou de l’admirable dévoûment du personnel formé et dirigé par lui. Aussi le nom de M. Samuel Cunard restera-t-il indissolublement attaché aux grandes entreprises maritimes de l’Angleterre. D’autres ont su l’imiter, mais non le surpasser.

Chose singulière, malgré tous leurs efforts, leurs capitaux accumulés, leur esprit d’entreprise, les Américains n’ont pas réussi à