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la volonté divine et l’impulsion de « ce ressort supérieur qui force le cœur de l’homme » s’étaient trouvés tout à fait d’accord avec les intérêts bien entendus de la princesse des Ursins.

Quelques jours après, le 7 juin, Louise-Marie de Savoie accouchait heureusement d’un second enfant, et la princesse se hâtait d’annoncer au roi de France cette heureuse nouvelle, espérant, sans doute, qu’elle calmerait son mécontentement et adoucirait quelque peu ses tristesses :


« Sire,

« La reine vient de donner à votre Majesté un petit-fils, gros et grand, et peut-être plus beau encore que le prince des Asturies. Le travail a duré si peu, qu’on peut dire que jamais accouchement n’a été plus heureux. Je prends la liberté, Sire, de vous en marquer ma joie, qui est d’autant plus grande que je suis persuadée qu’on ne saurait guère vous donner une plus agréable nouvelle.

« Je suis avec le plus profond respect, etc. »

Un mois plus tard, une proclamation solennelle, lue par les autorités municipales dans toutes les villes de la Péninsule, et affichée sur les principaux édifices, faisait connaître officiellement au peuple espagnol l’importante résolution que son roi venait de prendre. En voici les principaux passages, tels que la traduction mise sous nos yeux aux Archives des affaires étrangères les fait connaître :


« A Madrid, le 8 de juillet 1712.

« L’assurance que les couronnes d’Espagne et de France ne seront jamais mises sur une même tête… a été comme le préliminaire dans les vues qu’on a eues pour la paix, et principalement dans les propositions qui en ont été faites en Angleterre… C’est sur ce point et d’autres préliminaires qu’on est convenu du congrès qui se tient à Utrecht,.. pendant lesquelles négociations les morts imprévues des dauphins notre frère et de son fils aîné étant survenues, l’Angleterre… vint à proposer et à soutenir… qu’il fallait que je renonçasse, en mon nom et en celui de tous mes descendans, dès maintenant et à toujours, à la monarchie d’Espagne ou à celle de France, de telle sorte que, si je demeurais en Espagne, aucun de mes successeurs ne pourrait jamais succéder à celle de France, et que ceux qui règnent ou régneront en France, ni tout autre prince qui est issu de cette famille ou qui en naîtra, ne pourront jamais posséder la couronne d’Espagne.

« Je n’hésitai pas un moment sur le parti que j’avais à prendre, et aussi on ne me laissa pas le moindre loisir de prendre conseil