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qui n’ont que trop duré pour tous les intérêts qu’elles compromettent. Malheureusement elles ne finissent jamais qu’à moitié ; elles sont destinées à se survivre par les passions qu’elles ont éveillées, par leurs programmes que le radicalisme est toujours prêt à patronner dès qu’il y voit un intérêt de popularité. Or, à ne prendre qu’un des articles de ces programmes, — la réduction des heures de travail combinée avec l’augmentation des salaires, — imagine-t-on ce qui peut résulter de ce régime auquel on prétend soumettre l’industrie française ? A-t-on calculé les conséquences, la diminution inévitable de la production nationale, l’aggravation des charges de la fabrication, l’infériorité forcée dans la lutte avec la concurrence étrangère, les crises et les ruines dont les ouvriers seraient les premiers à souffrir ? Ceux qui ont encouragé les grèves peuvent essayer aujourd’hui de les apaiser par quelque trêve équivoque ; mais répareront-ils le mal qu’ils ont fait, les pertes qu’ils ont causées, les souffrances qu’ils ont contribué à infliger à d’honnêtes familles d’ouvriers ? C’est la question même pour la république. Et, en définitive, qu’est-ce que cette politique radicale qui ne représente que le déficit dans le travail national comme dans les finances, la misère pour les ouvriers, les guerres sociales, la liberté violée, la loi humiliée, l’agitation indéfinie, tout ce qui peut être exploité contre la France, tout ce qui peut affaiblir son crédit et la mettre en suspicion devant le monde ?

On a déjà longuement disserté, on dissertera encore à perte de vue sur la crise du changement de règne en Allemagne, sur les voyages de Guillaume II à Pêterhof, à Stockholm et à Copenhague, sur la visite qu’il a faite, en regagnant Berlin, à M. du Bismarck, dans sa résidence de Friedrichsruhe ; on a même fait un bon mot, on a dit qu’au retour de ses voyages, le souverain est allé faire son rapport au chancelier. En réalité, ce qu’il y a de plus clair provisoirement, c’est que l’empereur Guillaume paraît avoir recueilli plus de paroles courtoises que d’engagemens sérieux à Péterhof et que, dans tous les cas, il a été reçu assez froidement par la population de Copenhague aussi bien que par celle de Stockholm. Le reste est une énigme qui se débrouillera avec le temps. On saura bien un jour ou l’autre jusqu’à quel point la situation générale de l’Europe doit se ressentir de ces visites que l’empereur Guillaume vient de faire, aussi bien que de celles qu’il projette encore en Autriche et en Italie.

En attendant, on est réduit aux informations les plus variées, toutes naturellement plus sûres les unes que les autres ; on cherche le secret de tout, et, dans ce travail perpétuel, une des révélations les plus curieuses, les plus inattendues, est certainement la publication d’un document tout confidentiel, d’un rapport que M. de Bismarck aurait tournis à l’empereur Frédéric III au moment des projets de mariage de » princesse Victoria avec le prince Alexandre de Battenberg. C’est