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observé de nombreux affleuremens de dépôts de pétrole dans la -vaste région désertique que traversent les cours inférieurs de l’Amou-Daria et du Syr-Daria ; mais, ici encore, ce sont autant de trésors intacts réservés pour l’avenir. En tout cas, l’ingénieur Kranchine évalue à 500,000 kilomètres carrés la surface de la partie du désert turkmène qu’embrasse le Turkestan russe, et dont la richesse en pétrole est parfaitement avérée. C’est une surface qui équivaut à peu près à celle de l’Espagne.

En terminant cette rapide revue de la production du pétrole en Russie, je dois faire observer que, bien que les régions asiatiques de cet empire en fournissent la très grande majorité, la Russie d’Europe est loin d’en être dépourvue, car de nombreux gîtes de naphte sont exploités le long du Volga, entre autres à Simbirsk et à Astrakhan.

Si nous établissons maintenant un parallèle entre les faits relatifs au pétrole, tels qu’ils ont été observés aux États-Unis et en Russie, voici les résultats généraux qu’on peut en déduire.

En comparant les rapports officiels russes avec ceux des États-Unis, le produit annuel de ces derniers serait à peu près le double de la Russie. Les proportions seraient mêmes plus fortes (au-delà du triple) en faveur des États-Unis, si nous admettons les évaluations approximatives de M. Hue[1], qui porte la production annuelle des États-Unis à 5,376 millions, et celle de la Russie à 1,954 millions de kilogrammes (Bakou, 1,932 millions de kilogrammes, Caucasie, 6,720,000 kilogrammes, Transcaucasie, 15,624,000 kilogrammes). Il en résulterait que Bakou fournit, a très peu de chose près, la totalité de la production annuelle, puisque son chiffre est de plus de quatre-vingts fois supérieur à celui de toutes les autres localités russes prises ensemble. Or, la contrée de Bakou, même en y comprenant toute la péninsule d’Apcheron, n’a qu’une surface de 1,828 kilomètres carrés, dont seulement une partie est exploitée ; on voit combien la production des États-Unis est inférieure à celle de Bakou sous le rapport de la proportion entre le produit et l’étendue du terrain qui le fournit ; en effet, celui des États-Unis étant de 921,355 kilomètres carrés, ou cinq cents fois plus étendu que celui de la péninsule d’Apcheron, les États-Unis auraient dû produire non pas deux ou trois fois, mais cinq cents fois plus que la Russie.

Ce fait important prouve que Bakou compense amplement par sa richesse ce qui lui manque en étendue. En effet, nous avons vu que les puits de Bakou donnent par jour au-delà de trois fois autant que

  1. Le Pétrole. Paris, 1885.