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barre à Biskra, elle apparut, le 16 juillet, à cinq heures du matin, sur la lisière des oasis de Zaatcha et de Lichana. À cette apparition, les gens de Lichana, de Bou-Chagroune, de Tolga, de Farfar, prirent peur et firent leur soumission, mais de Zaatcha rien ne vint. A sept heures, le thermomètre marquait déjà 60 degrés; les troupes cherchaient un abri sous les palmiers de Farfar, quand une vive fusillade éclata. Le goum de Biskra, qui s’était avancé vers Zaatcha en reconnaissance, ramené en désordre, entraînait dans son mouvement de retraite les compagnies de grand’garde, et l’engagement menaçait de devenir général. Au gré du colonel Carbuccia, il était prématuré; le clairon donna le signal de cesser le feu; de leur côté, les insurgés, craignant de s’aventurer en plaine, se replièrent dans les jardins. Cependant des nouvelles graves arrivaient au colonel : de Bou-Sâda, de l’Aurès, des ksour, de nombreux contingens étaient en marche ; ils devaient entrer dans Zaatcha la nuit suivante. Dès lors, si l’on ne voulait pas se retirer sur Biskra, il n’y avait plus qu’à tenter immédiatement un coup de main.

Deux colonnes d’attaque furent formées : un bataillon de la légion, sous les ordres du commandant de Saint-Germain, devait enlever la zaouïa, pendant que le bataillon d’Afrique se porterait directement sur le ksar. A trois heures après-midi, sous un soleil implacable, le mouvement commença, protégé par l’artillerie. La zaouïa ne fit pas grande résistance ; après une seule décharge, ses défenseurs disparurent. On les suivit à la course dans le dédale des jardins, on sauta par-dessus les rigoles, on escalada les petits murs; mais tout à coup les assaillans s’arrêtèrent : un fossé large et profond les empêchait d’aller plus loin, et plus loin se dressait la muraille haute, crénelée, couronnée d’une ligne de feu. En vain les sapeurs accumulaient dans le fossé les fascines ; des quelques braves qui le traversèrent à la nage, le lieutenant Mangin revint seul. Le commandant de Saint-Germain fit avancer un obusier; les obus entraient dans le mur d’argile sans y faire brèche ; au neuvième coup, l’affût se brisa. A l’autre attaque, empêché par les mêmes obstacles, le bataillon d’Afrique ne fut pas plus heureux. Après un dernier effort tenté par les deux colonnes réunies, le colonel Carbuccia dut se résigner à faire sonner la retraite ; les assaillans se replièrent, emportant leurs blessés et leurs morts, 117 des premiers, 31 des autres. Pendant trois jours, le colonel demeura au bivouac, avec l’espoir de prendre en rase campagne une revanche dont l’ennemi lui refusa la chance. Le 19 juillet, à quatre heures du soir, la colonne, précédée du convoi et de l’ambulance, reprit le chemin de Biskra.

Du coup de main manqué sur Zaatcha il fut, en 1849, comme