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Syouah, telles que les oasis de Hattieh (30 mètres au-dessous du niveau de la mer), d’Aratch (— 7m,5), les lacs de Ssetra (— 15 mètres) et de Karn (— 41m,7). Toutes ces localités se succèdent sur une ligne courbe qui a près de 400 kilomètres de longueur du sud-ouest au nord-est. On ne sait si les dépressions continuent au nord et au sud de cette ligne, mais telle qu’elle est connue, la surface déprimée possède déjà une étendue fort considérable, évaluée à 1,000 kilomètres carrés, et lorsqu’on y ajoute la dépression du bassin du Fayoum (600 kilomètres carrés), nous aurons dans la partie septentrionale du désert libyen, ainsi que dans la contrée du Nil inférieur, une surface au-dessous du niveau de la mer qui embrasse presque sans interruption 1,600 kilomètres carrés.

Il est remarquable que, parmi les surfaces déprimées, les oasis figurent fréquemment. Or, comme les oasis constituent l’un des traits les plus caractéristiques, mais encore les moins connus du désert libyen, nous allons nous y arrêter un moment.


II

L’accablante monotonie que respire le désert est interrompue sur plusieurs points par des renflemens qui surgissent comme autant d’Iles verdoyantes au milieu de l’océan ; ces oasis sont particulièrement nombreuses entre la rive gauche du Nil et la Tripolitaine. M. Rohlfs, à qui nous devons le peu que nous en savons, les a réunies sous le nom collectif d’oasis de la Syrie, d’après le grand golfe de ce nom. Bien que parmi ces oasis il y en ait de fort intéressantes, nous ne mentionnerons que la plus importante, celle de Koufara, située à 600 kilomètres au sud-est du golfe de la Syrie, et à environ 1,000 kilomètres à l’ouest du Nil. Le nom de Koufara s’applique collectivement à cinq grandes oasis, séparées les unes des autres par les sables, et parmi lesquelles celles de Bouzaïma et de Kebabo sont les plus remarquables. La première, dont la surface est de 313 kilomètres carrés, est la plus belle oasis du désert libyen, car il en est bien peu qui possèdent, comme celle-ci, des montagnes, des lacs et des palmiers. De même que plusieurs autres oasis, celle de Bouzaïma offre des traces d’une ancienne population, sans qu’on puisse, pour le moment, la rattacher à aucune nationalité historique. La végétation est assez riche, et quant au règne animal, il est représenté par un curieux serpent que le professeur Peters a nommé Ragherris producta ; cet ophidien, qui habile les arbres, où il guette les petits oiseaux, les scarabées et les libellules, ne fait défaut à aucun palmier ou figuier de la contrée.

Au sud-est de l’oasis de Bouzaïma s’élève celle de Kebabo. Ce n’est pas seulement l’oasis la plus considérable de ce qu’on