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en vue des courses et des chasses, et fait commerce du surplus de ses produits. Mais, en France, le cardinal de Richelieu, en détruisant l’influence des grands seigneurs, qui abandonnèrent peu à peu leurs terres, laissées à des intendans, pour se rapprocher de la cour, porta un coup funeste à l’élevage.

Les difficultés qu’éprouva Louis XIV pour remonter sa cavalerie lui firent sentir l’importance qu’il y avait pour le royaume à s’affranchir de l’achat de chevaux étrangers. Par son ordre, Colbert formula, en 1665, un système de perfectionnement du cheval qui fut mis à exécution ; il reposait sur l’industrie privée, encouragée et soutenue par l’état. Des étalons, achetés de tous côtés à l’étranger, furent distribués dans les provinces. De nouveaux arrêts du conseil, rendus en 1667et 1668 sous Colbert, et, en 1683, sous le marquis de Seignelay, son fils et successeur, complétèrent l’organisation. Les mesures prises par Louis XIV avaient eu d’autant plus de succès que, pour plaire au roi, les courtisans prirent intérêt à l’élevage et s’y adonnèrent. Mais les guerres de la fin du règne firent disparaître la plupart des chevaux. Aussi, dès le début du règne suivant, le régent, prenant en main l’amélioration de l’élevage, créa divers établissemens qu’il peupla d’étalons orientaux.

Un règlement des haras fut rédigé en 1717 sous le titre de : « Mémoire du conseil du dedans du royaume pour servir d’instruction à MM. les intendans et commissaires départis dans les provinces du royaume, touchant le rétablissement des haras. » On y trouve un exposé complet de la question chevaline à cette époque : « L’épuisement des chevaux dans lequel les dernières guerres ont mis la France, et la nécessité d’y faire renaistre l’abondance, tant pour l’utilité du commerce intérieur que pour le service des troupes du Roy en paix et en guerre, demanderoient peu de discours pour prouver de quelle importance il est pour le bien de l’estat de s’appliquer au rétablissement des haras, si l’exemple du passé et le préjudice extrême que le royaume a souffert de l’abandon où ils ont esté par le défaut de secours nécessaire n’exigeoient de traiter la matière en détail et d’expliquer les règles que l’on doit suivre dans une affaire de cette conséquence, la possibilité dans l’exécution et les avantages qui en résulteront.

« MM. les intendans conviendront sans peine que rien n’est plus nécessaire au royaume que l’élève des chevaux de toute espèce pour les besoins, et que dans les estats les mieux gouvernés, on les y compte au nombre des premières richesses.

« Que le manque de chevaux a fait connoistre ces vérités d’une manière bien sensible dans ces derniers temps, où l’on s’est vu réduit à traiter l’argent à la main avec les Juifs pour tous les