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colonies hollandaises de l’archipel malais, puis, prenant la route du détroit de Torrès, se rendit successivement dans le nord de Queensland, à Brisbane, dans les provinces de la Nouvelle-Galles, de Victoria, de l’Australie du Sud. La commission allait quitter l’Australie quand elle fut abordée, à Townsville et ailleurs encore, par les ligues antichinoises qui la pressèrent d’empêcher la venue de nouveaux Chinois dans la colonie. Le général Wong, — qui est apparemment un Chinois d’esprit, — répondit à l’une de ces députations que pour lui les fils de Han étaient assurément beaucoup mieux chez eux que dans le Queensland : en ce qui concernait La réduction des salaires, le plus simple remède était de laisser faire les Célestes à leur guise, on verrait bien alors qu’ils sont tout disposés à se faire payer plus cher même que les Européens. A Townsville, les antichinois, qui semblaient s’entendre pour donner l’avantage au général, déclarèrent dans leur adresse que « les Européens ne pouvaient pas plus se résoudre à descendre au niveau des Chinois qu’à les élever au leur, » et que, s’il n’était mis un terme à l’immigration, Queensland deviendrait pour les Célestes un séjour peu enviable. Le général fronça le sourcil et rendit cet énigmatique oracle : « A mon retour en Chine, il sera fait quelque chose, et il se pourrait bien que ce soit plus ou moins qu’il ne vous conviendrait. » La commission rentrait en août à Hong-Kong et gagnait Pékin.

Le 21 décembre, l’ambassadeur de Chine à Londres remettait à lord Salisbury une note dans laquelle il attirait l’attention du gouvernement de la reine sur les traitemens infligés aux immigrans chinois en Australie et au Canada, et demandant qu’une enquête fût instituée sur les mesures législatives prises contre eux par les législatures de ces colonies. C’est cette note qui, transmise aux gouvernemens coloniaux, mit le feu aux poudres. Ce fut le prétexte d’une recrudescence d’agitation antichinoise en mai 1888 : on en a lu le récit plus haut. La conférence intercoloniale se réunit à Sydney, et, le 13 juin, lord Salisbury en informait l’ambassadeur de Chine, ajoutant que cette conférence allait rechercher le moyen d’établir une législation qui conciliât les demandes des colons avec celles du gouvernement chinois.

Le fond de la question, dont on parlait le moins possible, reposait en somme sur les droits parfaitement définis que les traités reconnaissent aux sujets chinois. Quels sont-ils ? L’article 1er du traité de Nankin (29 août 1842) stipule que les « sujets de l’empereur de Chine et de la reine Victoria jouiront de pleine sécurité et protection pour leur personne et leurs biens dans les limites îles états respectifs des deux souverains. » Par l’article 1er du traité de Tien-tsin (1858), celui de Nankin est « renouvelé et confirmé. » Par