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des climats chauds. Celle-ci ne se maintient évidemment qu’au prix d’une alimentation appropriée et d’une épaisse fourrure, l’écart entre elle et la température extérieure étant parfois considérable. Le capitaine Black, en effet, a noté la température de 41 degrés centigrades chez un renard, par un froid sibérien de — 35 degrés. Cela fait un écart de 76 degrés! A l’opposé des régions polaires ou des glaciers, voici les sources thermales. Ici encore, nous trouvons une faune et une flore spéciales. De nombreux observateurs ont dressé la liste des algues, infusoires et champignons qui habitent les eaux à 50, 60 et même 90 degrés centigrades, qui y sont prospères et s’y reproduisent : il serait inutile d’y revenir. Entre les êtres qui se plaisent dans les régions les plus froides et ceux qui habitent les sources thermales, ou les tropiques, viennent se placer tous les organismes dont la résistance aux températures extrêmes est moindre, et qui préfèrent les milieux plus tempérés, tout en manifestant une prédilection marquée pour tel ou tel degré de l’échelle thermométrique. Il suffit, pour s’assurer de ces préférences, de consulter les documens concernant la distribution des organismes et leur acclimatation. Le fait le plus curieux qui découle des données précédentes est, à notre avis, la grande résistance du protoplasma de certains êtres à des températures qui semblent devoir être mortelles, à en juger par ce qui se passe chez d’autres. Le protoplasma peut, chez certains, prendre la température de 0 degré, ou moins encore, et chez d’autres, celle de 90 degrés ou plus, sans périr. C’est là un fait singulier, parfaitement avéré, et que la physiologie ne peut expliquer, non plus que la chimie.

En somme, il existe, parmi les êtres, un certain nombre d’espèces, végétales ou animales, susceptibles de résister à des températures extrêmes, et vivant normalement à ces températures, alors que la plupart ne peuvent vivre que dans des milieux thermiques plus uniformes, plus modérés. Il nous faut voir maintenant comment les différens êtres résistent ou succombent aux températures qui ne sont point celles dont ils s’accommodent normalement, et quelle action celles-ci exercent sur eux.

Considérons d’abord les organismes hétérothermes, qui suivent les oscillations de la température ambiante, et dont la température propre s’élève et s’abaisse avec celle-ci, et dans les mêmes proportions, en raison de l’absence de tout mécanisme régulateur de la production et de la déperdition de calorique. Ces organismes sont certainement d’une sensibilité absolue moindre aux variations de leur température propre; seuls ils peuvent impunément subir des oscillations considérables de celle-ci, oscillations qui ne pourraient se produire chez les animaux homéothermes sans