Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 94.djvu/748

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du quart de la compagnie, — appartenant à d’autres classes de l’Institut. Il n’y a rien là que de parfaitement légal sans doute ; mais n’y a-t-il pas là aussi quelque abus dans l’exercice du droit conféré, et ne serait-il pas plus avantageux pour tout le monde qu’on usât désormais de ce droit avec plus de réserve ou, mieux encore, qu’on prit le parti d’y renoncer ?

Cette égalité absolue entre tous les membres de l’Institut dont on avait entendu à l’origine faire la condition fondamentale de leur association et que l’arrêté de 1803 ne laissait pas, au moins sur un point, de mettre en péril, on s’était d’autre part donné le soin de la confirmer par des résolutions secondaires et par des mesures de détail. Pour la rendre sensible aux regards comme on s’était efforcé d’en faire pénétrer l’idée dans les esprits, il avait paru utile de soumettre les membres des quatre classes à l’obligation de porter un costume uniforme, tant dans les séances publiques qu’ils devaient tenir ou le jour des funérailles d’un des leurs, que dans les cérémonies où ils seraient appelés à figurer à leur rang avec les grands corps de l’État[1]. C’était là du reste une innovation. Les anciennes académies n’avaient pas eu de costume officiel ; les membres des assemblées politiques de la Révolution postérieures à la Constituante avaient siégé en habits de ville ; mais, à l’époque du Directoire, le goût des marques distinctives et des accoutremens fastueux avait si bien remplacé les habitudes de simplicité que, depuis les représentans du pouvoir exécutif et les législateurs des deux conseils jusqu’aux administrateurs de tout ordre, on en était venu, sous prétexte de s’assurer le respect, à s’affubler de vêtemens d’un caractère niaisement théâtral.

Les membres de l’Institut n’avaient eu garde pour leur compte de se faire les complices de cette manie. Ils savaient trop bien que leur crédit et leur dignité morale n’avaient nul besoin de s’empanacher, pour ainsi dire, et que l’un et l’autre s’imposeraient d’autant mieux qu’ils affecteraient de moins pompeux dehors ; mais encore fallait-il qu’on put reconnaître entre tous les autres des hommes qui par leurs mérites exceptionnels honoraient si

  1. La place qu’il appartenait à l’Institut d’occuper en pareil cas avait été déterminée dès l’année 1798. Dans une fête que le Directoire avait eu l’idée, très fâcheuse d’ailleurs, de consacrer à la célébration du premier anniversaire du 18 fructidor, l’ordre du préséance pour les quarante-quatre groupes dont se composait la procession officielle avait été réglé de telle sorte que le groupe formé par l’Institut venait le trente-neuvième, n’ayant derrière lui que le tribunal de cassation, les ambassadeurs étrangers, l’état-major de Paris, les ministres et le Directoire. Aujourd’hui, c’est dans un ordre inverse que se forment les cortèges officiels. Les grands corps de l’État prennent la tête au lieu de marcher, comme autrefois, à la fin. Le Parlement (sénat et chambre des députés) passe le premier ; puis viennent le conseil d’État, la cour de cassation, la cour des comptes et l’Institut, qui précède immédiatement la cour d’appui.