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Ce fut aussi d’accord avec l’Académie que la décision fut prise de transférer l’École des Beaux-Arts, alors établie dans une partie des bâtimens de l’Institut, sur l’emplacement de l’ancien couvent des Petits-Augustins. On sait que, depuis la Révolution, un homme dont la mémoire mérite le respect et la reconnaissance de tous, Alexandre Lenoir, avait réuni en ce lieu, pour en former le Musée des monumens français, les œuvres les plus précieuses de notre art national arrachées par lui, tantôt de haute lutte, tantôt à force d’adresse, aux mains stupides des iconoclastes sans-culottes ou aux mains avides des pillards ; mais, à l’époque de la seconde Restauration, une ordonnance royale ayant prescrit la réintégration dans les églises ou dans les palais qui les avaient autrefois possédés de tous les monumens recueillis par Lenoir, l’ancien couvent des Petits-Augustins, ainsi dégarni, dut recevoir une destination nouvelle. Le projet, conçu à ce moment, d’y installer l’École des Beaux-Arts, semblait d’autant mieux justifié que celle-ci, lors de l’attribution à l’Institut de l’ex-collège des Quatre-Nations, avait été reléguée sous le même toit dans quelques salles basses à peine éclairées et notoirement insuffisantes, tant à cause de leur exiguïté que de leur petit nombre[1]. En outre, la translation des classes de l’École des Beaux-Arts hors des bâtimens où siégeait l’Académie avait cet avantage de faire cesser toute confusion apparente entre les deux établissemens et de bien marquer leur indépendance réciproque, conformément aux lois qui, depuis la fondation de l’Institut, régissaient chacun d’eux.

Tant que l’ancienne Académie royale de peinture et de sculpture avait existé, — c’est-à-dire depuis la seconde moitié du XVIIe siècle jusqu’aux dernières années du XVIIIe, — elle avait été un corps enseignant, une faculté des arts, si l’on veut, en même temps qu’une sorte de sénat dont les membres, par le fait même de leur élection, se trouvaient élevés au-dessus des autres artistes à titre

  1. Ces salles à rez-de-chaussée, s’ouvrant sur la grande-cour de l’Institut parallèle à la rue Mazarine, ont servi depuis les dernières années de la Restauration et servent encore aujourd’hui d’ateliers à quelques artistes autorisés par le gouvernement à les occuper leur vie durant ou à y réunir leurs élèves, Houdon, Bosio et Durci, parmi les sculpteurs ; Paul Delaroche, Horace Vernet et, plus récemment, M. Robert-Fleury, parmi les peintres, ont été au nombre de ces privilégiés.