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fourmillent près de 300,000 habitans, où les navires affluent de tous les points du monde. Ville riche, monumentale, populeuse et élégante, commerçante et studieuse, à laquelle les préoccupations matérielles ne font pas négliger la culture intellectuelle ainsi que l’attestent son université, son école des beaux-arts, ses musées, ses bibliothèques, son jardin botanique, l’un des plus riches du monde en collections minérales, végétales et animales.

Au nord de Bio-Janeiro, Bahia, port large ouvert sur l’Atlantique, écoule les bois dits du Brésil, le sucre et le café. Plus au nord encore, Pernambuco, la Venise brésilienne, port du tabac et des bois de teinture, centre d’un commerce de sucre également important.

Des échantillons de tous ces produits s’étalent dans le pavillon du Brésil ; ils confirment sa prospérité croissante, qui n’est rien encore en comparaison de ce que l’avenir lui réserve. Le jour où ces vastes forêts seront ouvertes et explorées, où des régions encore inconnues, perdues dans l’ouest, seront envahies par la civilisation, ce ne sera plus, comme aujourd’hui, par un milliard et demi de francs que se chiffreront l’importation et l’exportation de l’empire. Bien autrement élevée sera la part contributive du Brésil au mouvement industriel et commercial, à l’actif du monde.


IV

L’existence du Paraguay est un miracle, miracle de ténacité, de courage et d’énergie, et c’est avec une profonde sympathie que la France a vu cette république s’imposer, pour répondre à son appel et prendre part à l’Exposition, de sérieux sacrifices. Enclavé au cœur même du continent sud-américain, entre le Brésil, la Bolivie et la République Argentine, dont le séparent des frontières mal définies, sans ports sur l’Océan-Pacifique comme sur l’Océan-Atlantique, dont l’isolent, dans chaque sens, près de deux cents lieues de terre, accessible seulement par le Rio de la Plata et le Rio Paraná, que l’on remonte en six jours de Buenos-Ayres ou de Montevideo et que l’on redescend en trois, le Paraguay semblait devoir étouffer faute de communication avec le reste du monde. Cerné entre ses trois puissans voisins, engagé avec eux, en 1864, dans une lutte inégale et désastreuse, le Paraguay lutta six ans, sacrifia sur les champs de bataille les neuf dixièmes de sa population, plus d’un million d’habitans, sortit de la lutte vaincu, dépouillé, peuplé de veuves et d’enfans, réduit, encore aujourd’hui, à 346,000 âmes sur un territoire presque aussi vaste que la France et assez riche pour nourrir vingt millions d’hommes.

Découvert au XVIe siècle par les Espagnols qui, franchissant des