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une intensité de vie, une sève de végétation, que possèdent seules les terres vierges du Nouveau-Monde, de l’Australasie et de l’Océanie.


V

De cette revue rapide des richesses qu’étalent aux bords de la Seine, dans leurs palais luxueux ou dans leurs coquets pavillons, les nations des deux Amériques, un grand fait se dégage : l’accroissement prodigieux des matières premières, capital social de l’humanité, l’élan extraordinaire imprimé au commerce et à l’industrie, les résultats obtenus dans ces dix dernières années, gages assurés de ce que l’avenir, et un avenir prochain, tient en réserve. Le branle est donné, le mouvement lancé. Que l’on ne s’y trompe pas, nous assistans ici aux débuts d’une évolution économique et agricole, et non plus seulement financière comme celle qui, il y a quarante années, entraînait les aventuriers du monde entier sur les plages de la Californie. D’aucuns, les incrédules et les pessimistes, les hésitans et les sceptiques estiment que, dans quelques-uns de ces états, l’on va trop vite et trop loin, qu’on entreprend trop à la fois, que la fièvre de la spéculation a plus de part, dans les hausses formidables de terrains qu’ils enregistrent avec orgueil, que la prévoyance et le calcul ; qu’on se ruine parfois à vouloir trop vite s’enrichir et, qu’à trop emprunter, on court, risque d’employer en improductives dépenses des capitaux qu’il faut rémunérer tout de suite et rembourser plus tard. A quoi les optimistes de répondre : que la viande et le blé sont plus nécessaires que les métaux précieux ; que l’on affirmait aussi, au début de l’exploitation des placers californiens et australiens, qu’à trop extraire de l’or on avilirait sa valeur ; qu’à la hausse des terrains à San-Francisco succéderait une baisse formidable le jour où, le Pactole tari, une population, nomade par instinct, sédentaire par occasion, irait ailleurs chercher fortune ; qu’il n’en a rien été, et que le succès a été pour ceux qui eurent alors la foi robuste.

Et ils affirment qu’il en sera de même pour ceux qui, fondant leurs calculs sur l’augmentation régulière de la population du globe, prévoyant qu’avant peu l’équilibre sera rompu entre la production et la consommation tant des céréales que de la viande, estiment que la dépense la plus rémunératrice, le placement le plus avantageux est d’ouvrir à l’activité humaine des terres riches et fertiles, d’améliorer les semences, de multiplier les engrais. M. Grandeau, dans son intéressante communication au congrès international des grains et des farines, M. de Foville, dans ses curieux calculs statistiques, aboutissent aux mêmes conclusions. Sur notre globe,