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complètement : ne parlons pas non plus des restes de caséine provenant de la même origine. Négligeons enfin un assez grand nombre d’éthers se rattachant à divers acides, intéressans seulement aux yeux des théoriciens. Voici la composition du beurre : oléine (éther oléique de la glycérine)… 42,2 pour 100 ; stéarine et palmitine, 50 pour 100 ; butyrine… 7,7 pour 100. Le beurre pur renferme donc la moitié de son poids de butyrine et d’oléine, principes liquides.

A raison de la grande consommation qu’on en fait, le beurre du commerce, surtout celui qu’on débite dans les grandes villes, est fréquemment adultéré. Un habile dégustateur constatera sans la moindre manipulation quelques-unes de ces fraudes ; par exemple, il aura toujours soin de goûter des fragmens extraits de l’intérieur même du pain de beurre, pour s’assurer que ce dernier n’aura pas été « fourré, » opération qui consiste à entourer un noyau de beurre rance par une enveloppe de beurre frais de première qualité ; il n’est pas besoin d’être un fin gourmet pour découvrir la falsification grossière destinée à masquer la rancidité du beurre et consistant à le baratter avec de l’huile, ni pour s’apercevoir de la présence du fromage blanc, de l’axonge ou de la graisse d’oie.

Chacun se moque du préjugé d’après lequel un beurre est censé d’autant meilleur que sa nuance est plus jaune, ce qui n’empêche pas ces mêmes personnes de se décider, le cas échéant, en faveur de l’échantillon le plus coloré. Tout le monde connaît aussi l’usage du jus de carottes pour teindre le beurre, et nul ne sera rigoriste au point de condamner cette innocente pratique. Si cependant on voulait s’assurer qu’un beurre trop jaune doit sa belle couleur à la carotte, il suffirait de laver l’échantillon suspect avec un peu d’alcool faible ; ce réactif, sans avoir aucune action sur le beurre, entraînera la substance tinctoriale, et dès lors, le résidu évaporé Verdira par les alcalis. A la suite d’un semblable traitement, on reconnaîtra le safran au précipité orange qu’il forme avec le sous-acétate de plomb ; le rocou (teinture jaune extraite des capsules d’un arbre des tropiques appartenant à la famille des Liliacées), le rocou entraîné par l’alcool bleuit par l’acide sulfurique, et, enfin le curcuma, qu’on retire de la racine d’une sorte de balisier, brunit par les alcalis. Mais encore une fois, l’usage du curcuma ou du safran, l’emploi de la carotte ou du rocou (cette dernière drogue est fréquemment utilisée) n’offre aucun inconvénient pour la santé et n’est pas répréhensible. Seules, les couleurs tirées de la houille, comme l’éosine, sont formellement interdites.

Les globules butyreux de la crème, en s’agglomérant, absorbent toujours un peu d’eau mécaniquement entraînée ; la motte, une fois