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reprochera pas à la République d’avoir, dans ce domaine, trop peu bâti ; avant elle, on avait bâti si peu. Mais peut-être trouvera-ton plus tard qu’elle a trop bien bâti. Certes, il est bon que la science ait façade et pignon sur rue ; il y va de sa dignité et de son crédit dans l’opinion. À ce point de vue, nos nouvelles facultés sont parfaites. La nouvelle Sorbonne est un des plus beaux monumens de Paris, et n’aura de rivale qu’à vienne et à Strasbourg ; les facultés de Lyon sont admirables ; celles de Bordeaux vont de pair avec les plus beaux monumens modernes de cette élégante cité. Pourtant, quand je vois, en plein Paris, dans un quartier des plus denses, les masses puissantes de l’École de médecine et la longue enfilade de la Sorbonne, je ne puis me défendre d’une inquiétude et d’un regret. Je me demande si ces grands monumens inextensibles ; faits pour durer des siècles et des siècles, satisferont toujours aux exigences de la science. Qui sait, ce que deviendront un jour son outillage et ses engins, et si, au lieu de ces palais durables, mieux n’eussent pas valu de simples ateliers légèrement construits, partant faciles à remplacer, le jour où la science y aurait avantageant alors je méprends à regretter que, laissant la faculté des lettres à la Sorbonne, on ne se soit pas avisé, quand il en était temps, d’élever sur de vastes espaces, à la Halle aux vins, par exemple, au flanc du Muséum, une trentaine de pavillons et d’instituts distincts pour le service de la faculté de médecine et de la faculté des sciences… En Allemagne, une université n’est pas un monument ; c’est tout un quartier, parfois même une cité entière, la cité ouvrière de la science, où tous les services sont à la fois chacun chez soi et groupés tous ensemble, comme les pièces organiques d’un même appareil. Tout autre a été presque partout le type de nos facultés nouvelles. A l’ordre dispersé, nous avons préféré la concentration derrière la même façade, sous le même toit, de services dissemblables peu faits pour cohabiter ensemble. C’est un peu la faute, si faute il y a, de nos professeurs qui, dans les débuts, n’étaient pas assez au courant des installations de l’étranger, et qui, jugeant de ce qu’on leur offrait, par ce qu’ils avaient, se montraient facilement satisfaits. Mais c’est aussi, n’hésitons pas davantage à le dire celle des architectes, qui plus d’une fois, dans une faculté à construire, ont vu moins des services à pourvoir d’organes appropriés qu’un monument à édifier. Soyons justes cependant, et n’exagérons rien. Ils nous ont donné presque partout de beaux monumens et plus d’une fois ils ont su concilier les exigences de la science et celles de l’art. Ainsi dans la nouvelle Sorbonne, la faculté des sciences, bien que formant un tout et faisant corps avec la faculté des lettres, aura pour chaque ordre de science des installations complètes et