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HALLALI ! 9 — Mais ceux-là, dit-il, c’est moi qui les ai laissés, qui les ai ou- bliés, hier au soir, sur cette table. Puis, voyant que la jeune fille se troublait, il reprit : — Je le crois, du moins, car je suis à peu près seul à hanter cette bibliothèque et à y mettre quelquefois le désordre... En tout cas, le commerce des livres m’étant plus habituel et plus familier qu’il ne peut vous l’être, à vous, dites-moi ce que vous cherchez : je vous aiderai. — Plus tard... Vous n’êtes pas en avance, savez- vous bien? — Mais... vous? — Moi, je ne suivrai pas la chasse aujourd’hui. — Bah!... Voilà du nouveau, par exemple! Tout à l’heure encore... — Monsieur Real, vous tournez à l’inquisiteur. — C’est vrai, mademoiselle, et je suis sans droits... hélas! L’expression d’impatience qui avait, un moment, contracté la belle et douce physionomie de la jeune fille, fit place sur-le-champ à un compatissant, à un bienveillant, mais peut-être trop facile et trop large sourire, lequel éclaira cette remarquable figure et devait lui être plus coutumier que les airs rébarbatifs ou railleurs. — C’est qu’aussi la phrase du jeune homme avait été bien plaintive et son accent bien douloureux. — Allons, dit Marie-Madeleine, ou plutôt allez, monsieur Frantz. Vous direz que je rejoindrai plus tard... qu’il est arrivé un accident à mon costume... Vous direz ce que vous voudrez; mais vous me rendrez service en me laissant ici... Je suis horriblement nerveuse, ce matin... Une contrariété un peu vive... Enfin, je me sens inca- pable de suivre cette chasse. — J’obéis, mademoiselle, avec... résignation, quoique je me fisse une fête de vous accompagner seul à seule. — Ah çà ! dites-moi, ma cousine est donc décidément votre complice? — Oui. Elle sait que je vous aime et veut bien s’en déclarer enchantée. — C’est-à-dire que vous tenez à votre idée et que vous réussis- sez à la faire épouser aux autres... ou à d’autres, en attendant que vous m’épousiez moi-même? Merci de l’honneur... Mais à l’im- possible... — L’impossible! s’écria le jeune homme. — Parlez-en donc à M. de Buttencourt, de votre idée. Vous ver- rez comme il l’accueillera!.. Il s’est mis en tête de me donner un mari de son choix. — M. de Buttencourt, un cousin par alliance, et qui n’est votre