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d’assaut. Boulaq était une des villes les plus riches de l’Egypte ; nos soldats y firent un butin immense qu’ils amoncelèrent au camp devant le Caire.

Aussitôt après cette opération, on forma un détachement composé des grenadiers de la 32e, du régiment des dromadaires et du 14e dragons. On nous donna l’ordre de nous rendre à Suez, que les Anglais occupaient. Nous partîmes, le 18 avril au soir, de la ferme d’Ibrahim-Bey, nous fûmes coucher au fort Sulkowsky. Nous le quittâmes le lendemain matin, pour entrer dans le désert qui forme l’isthme de Suez.

Nous marchions la nuit pour éviter la chaleur du jour, qui était déjà très forte. Nous ne nous attendions en aucune façon à rencontrer l’ennemi ; nous étions harassés de fatigue et marchions sans ordre. Deux pièces de canon de huit étaient dans leurs encastre-mens de route et encombrées de sacs, de couvertures, etc.

Vers minuit, nous donnâmes tout à coup dans un corps de cavalerie ennemie. Notre surprise fut extrême, nous crûmes être tombés dans une embuscade. Cependant nous nous remîmes promptement. Le feu s’engagea. Il dura environ une demi-heure. Les cavaliers que nous venions de heurter pendant la nuit, étaient des mamelucks. Ils avaient été aussi surpris que nous. Ils se sauvèrent vers Suez où ils donnèrent l’alarme. Ils laissaient dix morts sur le terrain.

Nous continuâmes notre route avec plus de circonspection et d’ordre.

Nous arrivâmes à Bird-Suez (puits de Suez), c’est une citerne d’eau saumâtre ; il faut avoir traversé le désert pour trouver cette eau potable ; nous y fîmes halte. Nous y laissâmes l’ambulance, les blessés et nos chameaux. Nous apercevions l’escadre anglaise composée d’un vaisseau, le Léopard, de deux frégates et de deux bricks, qui mouillait sur rade. Bientôt nous vîmes des chaloupes occupées à rembarquer des troupes. C’était un détachement de 600 hommes d’infanterie anglaise, commandé par le colonel Murray.

Cet officier ne laissait, pour la défense de la ville, que 1,500 cipayes, outre les équipages de la flotte de la Mecque (par Djeddah), composée de 80 voiles, qui arrivait et mouillait dans le port.

Nous nous formâmes en colonne et marchâmes contre la ville. Elle était entourée d’un mur crénelé portant quelques pièces de canon.

Nous essuyâmes le feu de l’artillerie de la place. Nos deux pièces de 8, pointées par un capitaine du 4e d’artillerie, démontèrent deux des canons des remparts, et nous pûmes ensuite arriver plus facilement au pied du mur. Il n’était pas très élevé. Nous ne perdîmes pas