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et la velouterie de Saint-Étienne. La chambre de commerce de cette ville porte, en effet, à 65 pour 100 la part des matières premières dans le prix de revient net des rubans. On peut donc dire que les 4 millions 500,000 kilogrammes de soie consommés en France représentent avec les filés de coton de laine et de bourre qui leur servent de supports, plus de 300 millions de francs, c’est-à-dire près de la moitié du prix de revient de nos tissus de soies français. Le reste se partage en salaires, en intérêts de capitaux et bénéfices industriels ou commerciaux.

Ces matières premières, où la soierie française les prend-elles et de quels centres de production est-elle tributaire ? Sur plus de 4 millions 500,000 kilogrammes de soie que la France emploie, environ 600,000 kilogrammes seulement lui sont fournis par la récolte indigène, le surplus de la production de celle-ci étant exporté. D’un tableau publié par la chambre de commerce de Lyon, il résulte que la fabrique de cette ville a, dans ces dernières années, employé 13 pour 100 de soie française, 20 pour 100 de soie italienne, 1/2 pour 100 de soie levantine et près de 60 pour 100 de soie chinoise, japonaise et hindoue. La fabrique de Saint-Étienne, de 1873 à 1889, a consommé en moyenne 6 pour 100 de soie française contre 94 pour 100 de soies étrangères, la plupart venues de Chine et du Japon. Paris, Saint-Chamond, Saint-Pierre-lès-Calais et Roubaix consomment également de préférence les soies asiatiques en raison de leur bon marché et surtout des progrès que les filatures japonaises ont réalisés. Il est donc permis de dire que l’Orient et l’Italie sont nos deux grandes sources d’alimentation et que nos tissages en sont tributaires. La Chine, le Japon, la Syrie, l’Inde ne nous sont pas seulement indispensables par l’importance de leur production, mais par le caractère même de cette production qui compte beaucoup de soies inférieures, d’un prix peu élevé et, en conséquence, excellentes pour les tissus à bon marché que la consommation réclame de préférence.

Sous quelles formes diverses les soies étrangères entrent-elles en France ? Cette question de détail a son importance au point de vue du travail national. Il s’agit, en effet, de savoir si nos tissages ont intérêt à acheter au dehors les soies déjà filées et ouvrées de préférence aux soies grèges. Or il résulte des statistiques d’importation de ces dernières années, compensation faite des sorties et des entrées, que nous consommons en moyenne 650,000 kilogrammes de soie française contre 3 millions 400,000 kilogrammes de grèges étrangères et 300,000 kilogrammes de soie ouvrée étrangère. La soie provenant de cocons importés est en quantité insignifiante. Il appert de ce tableau que nous importons la plus grande partie des soies étrangères à l’état grège et que la