L’un de ces hérétiques était Cérinthe ; Irénée nous a conservé les grandes lignes de sa doctrine[1], c’est la doctrine même des Ébionites ; il ne voit en Jésus qu’un homme, dans lequel, au moment du baptême, un démiurge, un Éon, appelé Christ, est descendu. Un autre de ces faux docteurs était le diacre Nicolas, dont les mœurs déréglées s’alliaient aux spéculations les plus insensées sur la nature de Dieu, sur la création et les rapports entre Dieu et l’univers[2].
C’est pour combattre ces erreurs que l’un des apôtres écrivit un quatrième Évangile[3]. Cet apôtre est Jean, le disciple bien-aimé. Tous les chefs des églises d’Asie, l’apôtre André à leur tête, l’en prièrent[4]
Nul mieux que lui n’était capable d’attester la vérité.
Il n’oppose point une doctrine humaine, un système philosophique, à des doctrines humaines, à de vains systèmes de philosophie. Il n’est pas un philosophe, il est un témoin. Il ne connaît que la parole de son Maître, et il ne dit que ce qu’il a entendu. Tandis que saint Paul, dans ses épîtres, raisonne et discourt sur les faits évangéliques, sur la doctrine du Christ, sur l’œuvre de la Rédemption, sur sa mort et sur sa résurrection, saint Jean, recueillant ses souvenirs, inspiré par l’Esprit dont il était éclairé et qui lui suggérait, comme Jésus l’avait promis à ses fidèles, tout ce qu’il fallait dire, saint Jean rend témoignage : tout ce qu’il rapporte a un but, un seul but, établir la foi en Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, source de la vie éternelle.
Il ne s’agit plus de démontrer par l’histoire, comme l’ont fait saint Matthieu, saint Marc et saint Luc, que Jésus est le véritable Messie promis aux Juifs, et le Sauveur de toute créature par le repentir et la foi ; il s’agit de déterminer la vraie nature divine de « Celui qui est apparu dans la chair. »
Qu’est-ce que le Fils de Dieu ? Quels sont ses rapports avec l’Être divin qu’il nomme son Père ? Qu’est-il venu accomplir en ce monde ? En quoi consiste le salut dont il est l’auteur ? La réponse à ces questions est tout le quatrième Évangile. Ce n’est pas Jean qui parle, c’est Jésus même ; car lui seul pouvait nous renseigner sur sa vraie nature divine. Le mot par lequel l’Évangéliste ouvre son écrit et qui forme le résumé de tout ce qu’il va rapporter, est ce mot de Parole, de Verbe, de Logos. « Dans le Principe était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu.