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collision, comme si le commissariat général et la chambre des domaines n’appartenaient pas également au roi de Prusse. Le commissariat a des avocats payés de ma bourse, pour plaider contre les finances, par conséquent contre moi. Les finances, pour se défendre, ont également des avocats, payés de ma bourse. » Il était temps de mettre fin à cette « œuvre de confusion. » En conséquence, ces messieurs des deux collèges étaient informés qu’ils étaient fondus en un seul, « le directoire général supérieur des finances, de la guerre et des domaines (General-Ober-Finanz-Krieges-und-Domänen-Directorium). » Ils furent ensuite menés dans une salle. Ilgen y indiqua sa place à chacun, et, debout, devant le portrait du roi, lut l’instruction. Il les introduisit alors chez le roi, qui reçut leur serment « de travailler, autant qu’il est humainement possible, au service et bien de sa majesté royale, en particulier à l’augmentation et amélioration de toutes les sortes de revenus, et en même temps à la conservation des sujets, aussi bien dans le plat pays que dans les villes, et, par contre, d’éviter et prévenir tout ce qui peut être nuisible à sa dite majesté royale et à la maison royale, aux pays et fidèles sujets. »

Accroissement des revenus, conservation des sujets, voilà deux principes : le roi y insiste dans l’instruction. « Tout le monde sait les conséquences redoutables de mesures mal prises, et que de trop lourdes charges, énervant les sujets, les mettent hors d’état de fournir intégralement au souverain les prestations ordinaires. » Autre principe : les charges publiques seront également réparties entre tous. La contribution sera taxée « d’après des cadastres qui seront toujours tenus au courant, » et personne ne sera exempté de l’accise : « Nous la voulons payer, nous et notre maison royale. Toutes les voitures, depuis les nôtres, jusqu’à celles du dernier paysan, seront visitées ; » car le poids de l’État « doit peser également sur toutes les épaules. »

Ce sont à peu près les seules idées générales qui se trouvent dans le document. Elles valaient la peine d’être dites, car elles expriment toute une philosophie d’État. Ce n’est pas une ordonnance fiscale que Frédéric-Guillaume a écrite dans sa maison de chasse : c’est une charte, la grande charte d’une monarchie de sorte particulière, où le monarque est confondu dans l’état, comme le Dieu de Spinoza dans la nature. Bien entendu, ce ne sont pas des formules qu’écrit Frédéric-Guillaume: ce sont des vérités. Il a horreur des vaines déclarations et des principes « qui se perdent dans le vent et la vapeur bleue. »

Avec une grande clarté, il décrit l’organisation nouvelle. Le directoire est divisé en départemens, dont chacun est présidé par un ministre. Les départemens n’ont point de spécialités d’affaires :