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pour 100, amenant les eaux de lavage dans un canal par l’intermédiaire d’une grille syphoïde qui empêche tout retour d’odeurs, car la moindre impureté peut contaminer le lait et compromettre la fabrication : les petits canaux aboutissent à une rigole collective qui conduit les résidus loin de la fromagerie. Murs blanchis au lait de chaux. Dans la chambre à lait et les caves, plafond constitué par une voûte plate en briques.

Une pièce centrale, le vestibule, commande toutes les autres : là se font la réception et les analyses du lait, la vente, le pesage des fromages. Le pèse-lait indique soit la quantité, soit le poids, ce qui n’a pas grande importance, puisque le litre de lait pèse environ 1 025 grammes : les Suisses emploient la romaine, seule mesure fédérale reconnue ; en France, on se sert du pèse-lait à cadran, instrument très pratique qui détermine plutôt la quantité ; un certain nombre de fruitières du Jura et de l’Ain emploient un appareil, appelé flottomètre, qui mesure le lait et ne le pèse point. Les analyses de lait suspect et de beurre se font avec le crémomètre, le lacto-densimètre[1], le lacto-fermentateur et le lacto-butyromètre de Dietsch. Le vestibule présente cet avantage que les sociétaires ne pénètrent pas dans la cuisine et ne dérangent point le fromager dans son travail.

Voici la cuisine, bien éclairée, placée au sud et à l’est, avec un plafond de bois enduit d’un lait de chaux, parce que le plâtre tomberait sous l’influence des vapeurs produites. Le foyer, adossé au mur en maçonnerie, a la forme d’un calice, encastre hermétiquement la chaudière, empêche le passage de la fumée ou des cendres : il se ferme en avant par une large porte en tôle, à deux battans, qui permet à la chaudière d’entrer et sortir à volonté. Celle-ci se suspend à une potence en fer, mobile sur deux pivots, servant à l’introduire dans le foyer ou à la retirer. Il y a aussi des appareils à foyer mobile et chaudière fixe. Dans quelques grandes fromageries, on chauffe les chaudières à la vapeur, procédé excellent, supérieur aux autres, mais peu pratique en raison des frais d’installation qu’il entraîne[2]. La capacité des chaudières varie de 300 à 700 litres pour le gruyère, et de 1 000 à 2 000 litres pour

  1. On considère comme lait malade, le lait aqueux, qui ne mesure pas 10 pour 100 de crème ; le lait acide, le lait bleu, le lait mucilagineux ou filant, le lait graveleux, le lait amer, le lait rouge, etc. Le lait falsifié est le lait écrémé, coupé d’eau, additionné de farine, amidon, gypse et autres matières étrangères.
  2. On peut évaluer à 1 600 francs les frais d’achat du matériel nécessaire à la confection des fromages et du beurre pour une fruitière moyenne traitant 500 à 800 litres de lait par jour. Dans beaucoup de fruitières, le fromager fournit une partie des objets nécessaires à la confection des fromages ; chaudière, tranche-caillé, brassoirs, poches à écrémer, présure, sel, bois, toiles, moules, etc.