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UNE INDUSTRIE PASTORALE.

nière à recevoir le lait qui, après avoir été pesé sur un plateau, vient s’y déverser. Près de là se trouvent les presses ; une annexe du bâtiment renferme la machine à vapeur qui dirige tous les appareils et chauffe le lait pendant qu’il est dans les cuves… Tous les ans, la qualité du fromage s’améliore, et elle devient de mieux en mieux appropriée aux besoins du marché anglais. » Ces laiteries coopératives ou hollanderies ont pris naissance dans le comté d’Oneïda ; plusieurs entretiennent des troupeaux de 1 500 vaches, une bourse spéciale a été fondée à Utique. En général, les fermiers associés ne livrent le lait qu’une fois par jour ; un bon fromager se paie 50 dollars (250 francs) par mois, et on calcule que 10 livres de lait fournissent une livre de fromage. Les États-Unis d’Amérique possèdent plus de 41 millions de bêtes à cornes, parmi lesquelles on compte au moins 10 millions de vaches laitières[1] : la production annuelle dépasse 100 millions d’hectolitres, dont 35 sont convertis en 100 millions de kilogrammes de beurre et en 150 millions de kilogrammes de fromages divers (Chelder, Chester, Hollande, Gruyère, etc.). Depuis dix ans, ils ont adopté le système suédois : réfrigérans, écrémeuses, malaxeurs, presses ; en 1870 ils exportaient 1 million de kilogrammes de beurre, 20 millions en 1880 ; leur exportation fromagère a progressé de 25 millions de kilogrammes en 1870, à 97 millions en 1879 ; en 1884, elle dépassait le chiffre de 506 000 quintaux métriques. Tout les favorise : des prairies sans limites, l’esprit d’initiative et de progrès, un service de chemins de fer bon marché, une navigation excellente. De son côté, le Canada exportait en 1884 pour plus de huit millions de francs de beurre, et pour 36 259 945 francs de fromages[2].

En Allemagne, on a fait venir du bétail et des fromages suisses, on a étudié avec soin les procédés de ce pays, et maintenant on y fabrique du gruyère de bonne qualité. Et non-seulement du gruyère, mais du brie, du camembert. M. Lézé, professeur à l’école de Grignon, en a rencontré de nombreux échantillons en 1884, à l’Exposition laitière de Munich. Quant au Danemark, il occupe le premier rang pour la qualité du beurre. Grâce aux conseils du docteur Segelcke qui a montré à ses compatriotes les avantages du marché de Londres pendant l’hiver, ils exportent moins de céréales, les

  1. Clare Read et A. Pell : l’Agriculture aux États-Unis. — Enquête américaine. — Tisserand : l’Agriculture du Danemark. — Annales de l’Institut agronomique. — Bulletins du ministère de l’agriculture (années 18S3 et suiv.).
  2. Sur 13 millions de bêtes à cornes, la France a environ 5 millions de laitières, dont elle tire 68 millions d’hectolitres de lait ; 25 millions sont transformés en 73 milions de kilogrammes de beurre et 112 millions et demi de kilogrammes de fromages, valant ensemble 282 millions de francs.