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une question sur laquelle il nous faudra quelque jour revenir ; et montrer dans ses romans ce vrai « curé de village, » dont Balzac lui-même ne nous a donné jadis que la très imparfaite esquisse.

Nous rapprocherons de Xavière le roman de M. André Theuriet : L’oncle Scipion[1], illustré par M. S. Rejchan. Ce n’est pas sans doute ici que nous avons besoin de recommander un récit nouveau de M. André Theuriet. Nous n’en pourrions rien dire que nos lecteurs ne sachent comme nous. Ils retrouveront dans L’oncle Scipion les qualités habituelles de l’un de nos rares romanciers qui connaisse encore la province ; qui se souvienne en prose d’avoir été poète, qui le soit toujours ; et dont je ne vois pas qu’aucun « naturaliste » ait passé l’exactitude et la fidélité d’observation.

La librairie des bibliophiles nous donne cette année le troisième volume du Théâtre d’Alfred de Musset, illustré de dessins de M. Ch. Delort, gravés par M. Boilvin[2]. Mais nous avons déjà dit, l’an dernier, ce que nous pensions de cette belle publication ; et nous réserverons pour la nouvelle édition des Mémoires de Mme de Staal Delaunay[3], illustrés par M. Lalauze, le peu de place dont nous disposons.

C’est que l’illustration nous en a paru singulièrement heureuse, et que, parmi tant de « suites » que nous devons à M. Lalauze, il y en a quelques-unes sans doute, mais il n’y en a pas beaucoup qui soient une traduction plus fidèle du texte, ni surtout plus spirituelle. On connaît les Mémoires de Mme de Staal ; on sait quel en est le prix. La langue, assez irrégulière, ce qui n’est jamais un défaut chez une femme, et cependant un peu précieuse, ce qui est presque une qualité, n’en est pas moins exquise, pour ne pas dire unique de transparence et de limpidité. Lisons donc les Mémoires de Mme de Staal, si nous voulons savoir ce que l’on peut avoir d’esprit en le cachant, et lisons-les si nous voulons savoir ce que c’était que le bon ton au temps de la Régence. La pointe de M. Lalauze a rivalisé d’aisance, d’agrément, d’élégance, avec le texte qu’elle interprétait ; et si la louange est brève, nous osons dire qu’elle n’est pas médiocre.

Nous goûtons beaucoup encore, dans un tout autre genre, les illustrations de M. Adrien Moreau, pour le Peveril du Pic[4], de Walter Scott, traduit par M. P. Louisy. Nous avons déjà dit plusieurs fois avec quel intérêt nous suivions la louable entreprise de cette « traduction illustrée » de Walter Scott. Si Walter Scott écrit mal, nous l’ignorons ; nous n’en sommes pas au moins les juges, au travers d’une traduction ; et, après tout, quelques incorrections ou quelques longueurs ne seraient pas pour nous émouvoir. Il nous suffit que peu

  1. 1 vol. in-8 » ; Alphonse Lemerre.
  2. 1 vol. in-8o ; Librairie des Bibliophiles.
  3. 2 vol. in-18 ; Librairie des Bibliophiles.
  4. 1 vol. in-in ; Firmin-Dido