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UNE
AMIE DE DESCARTES

ELISABETH, PRINCESSE DE BOHÊME.

Pourquoi raconter une histoire quand on ne la sait pas ? La réponse est facile ; que sais-je ? devrait être la devise de tout historien sincère. Les romanciers seuls connaissent les aventures qu’ils enchaînent et les caractères qu’ils ont créés. Quand on dit ce qu’on sait, on n’est pas obligé à davantage.

Les documens sont nombreux sur la princesse Élisabeth, première fille de Frédéric, roi de Bohême, comte palatin et prince électeur de l’empire ; mais ils sont brefs. Sans être contradictoires, ils révèlent les contrastes cachés dans toute figure humaine, et apparens surtout dans les natures d’élite. Il est prudent d’ailleurs de n’écouter sans défiance ni les louanges extraordinaires données par les amis d’une princesse, ni les souvenirs, affaiblis par le temps, d’une nièce fort peu respectueuse, qui, dans ses lettres amères et piquantes, a plus d’une fois trahi la vérité.

Élisabeth, née sur les marches d’un trône, pouvait dire : mon aïeule Marie Stuart, reine d’Écosse ; ma grand’mère Juliane, fille de Guillaume le Taciturne. Elle a connu son oncle Charles Ier, et son neveu George Ier, tous deux rois d’Angleterre, sa nièce Élisabeth-Charlotte, princesse d’Orléans et belle-sœur de Louis XIV, sa petite nièce Sophie-Dorothée, grand’mère du grand Frédéric et